- Academie de Saint Anselme - Nouvelle Serie - 01/01/1985
Langue française et institutions du Duché d'Aoste 11 bien que Philippe II, qui avait créé le désert dans certaines parties de ses territoires, n'avait rien obtenu de substantiel, et avait seule– ment provoqué de sanglantes guerres et le malheur de ses sujets: «fac– ciamo disabitare lo stato e popoliamo l'altrui, restando in ogni modo la peste in casa, attesoché tutti quelli che sono infettati non si sono dichiarati né sono usciti dal paese». Récemment encore, Jean-Claude Margolin a évoqué dans l'important congrès que les savants savoyards ont dédié à Marguerite de Savoie, en 1974, la réponse que le due Emmanuel-Philibert aurait donné à une députation de Vaudois à la veill~ de cette «trève», de cet édit dont nous venons de parler: «C'est en vain que le pape et mon conseil me pressent d' exterminer ce peu– ple; j' en ai pris conseil de Dieu dans mon coeur, il me presse plus fort encore de ne pas le détruire». Et c'est précisément à un éveque d'Aoste, à Mare Bobba, qu'il avait écrit dès 1558, qu'il était absurde de tuer en public des «fanatiques» et qu'il fallait se résoudre à s'en défaire en secret, ou, mieux encore, «user de clémence». Celà nous amène à rappeler quelles étaient les conséquences de cette sorte de contrale politique que le puissant monarque espagnol, allié dans un sens assez équivoque, d'Emmanuel-Philibert, exerçait sur ses territoires, qui étaient parcourus par ses soldatesques, et dont quelques places fortifiées étaient meme occupées par des garnisons espagnoles. Notre due s'en excusait, pour ainsi dire, auprès de ses sujets, lorsqu'il devait constater que le passage des troupes alliées avait amené de remarquables dégats: dans ses lettres patentes du 24 juillet 1568 il assurait ses sujets valdòtains qu'il avait fait tout ce qui lui avait été possible de faire pour que ces soldats causent le «moindre mal» à leurs champs età leurs vignobles . En passant, il donnait dans ces lettres une image saisissante du paysage rustique de la vallée à cette époque: comme nous savons fort bien qu'estant le dit pays de sa nature estroit, et les meilleures possessions joignant les grands chemins, et la plupart d'iceux couverts de treilles à raisin, ils ne sauraient passer Oes sol– dats] sans suyner et gaster tout le meilleur du dit pays, à quoi il nous plaise avoir égard, et de vouloir les avoir pour recommandés dans cette cherté de vivres, où le dit pays est maintenant.
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