- Academie de Saint Anselme - Nouvelle Serie - 01/01/1987

Alexandre Passerin d'Entrèves 53 Rétrospectivement, je regrette de n'avoir pas interviewé A.-P. d'E., camme je l'ai fait pour tant d'autres protagonistes (il est vrai du coté «français»), sur sa participation aux grands événements de la guerre et de l' après-guerre, et meme sur bien d' aut),"es sujets qu'il dominait souverainement. Car il me faut souligner ici l'immense cul– ture classique du personnage - je l' entends encore pariant de Dante, de Montesquieu, deJean-Jacques Rousseau, de Tocqueville, qu'il sem– blait, entre autres, connaitre merveilleusement - et par sa grande proximité ou si l'on préfère par sa simplicité relationnelle: pas le moin– dre coté vaniteux, infatué, m'as-tu-vu, camme on en trouve des échan– tillons chez certaines personnes du petit monde valdotain: il n' en avait simplement pas besoin. En sa personne, le philosophe du droit, le politologue érudit m'apparaissait cotoyer l'honnete homme au com– merce à la fois plaisant et instructif. Alors, comment le situer par rapport à la Vallée d'Aoste, à Fré– déric Chabod, au régime d'autonomie, à l'évolution actuelle de la région? Je crois qu'A.-P. d'E. fut profondément un démocrate libéral atta– ché aux valeurs culturelles de l'Europe occidentale, un disciple de Montesquieu et de Tocqueville politiquement parlant, mais- et peut– etre aussi est-ce là une question de génération et de niveau socio– professionnel - ne concevant guère de séparation quelconque entre le Val d'Aoste et l'Italie, ni d'autre solution que l'intégration har– monieuse de la région au sein de l'Etat grace aux réformes de struc– ture réalisées par ce dernier (décrets de septembre 1945, Constitution et statut spécial de 1948) et aussi grace à l'usage que feraient les Val– dotains eux-memes des nouvelles possibilités qui leur étaient ainsi offertes. Non seulement bilingue, mais au moins trilingue quant à lui (il possédait admirablement, outre l'italien, le français et l'anglais, et avait une benne connaissance de l' allemand), il ne cessa de se sentir chez lui avant tout dans le pays de ses ancetres, dans cet univers limité dans l'espace qui le rapprochait de la Savoie sans trop l' éloigner du

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