- Academie de Saint Anselme - Nouvelle Serie - 01/01/1991

170 Joseph-César Perrin tures et outils pour les casernes et les hòpitaux; à cela s'ajoutaient les réquisitions de magasins pour les provisions de vivres et de fourrage ou celles de logements pour les militaires au moment du passage des troupes. Naturellement ces prestations en nature ou en services genaient énormément notre population campagnarde pour laquelle les uni– ques moyens de subsistance étaient justement les produits de la ter– re. Les réquisitions de grains et d'autres aliments enlevaient aux fa– milles une grande partie de leur nourriture, les exposant aux risques de la famine. Mais elles diminuaient surtout la possibilité de vendre les excédents des produits de la terre sur les marchés et de récupérer ainsi un peu de cet argent liquide nécessaire pour l'achat des denrées d'importation ou pour le payement des tailles. :Lon pourrait objecter que les fournitures militaires n'étaient pas gratuites et que la vente des denrées aux services royaux, quoique forcée, pouvait largement suppléer à l'impossibilité d'alimenter le commerce; que les agriculteurs recevaient de l'Etat ce qu'ils ne rece– vaient plus des commerçants; que la guerre les favorisait meme, car l'écoulement de leurs produits, au lieu de dépendre des nécessités inconstantes du commerce, était assuré par les exigences quotidien– nes de l'armée. Ces objections, qui à première vue pourraient sem– bler vraies, ne régissent cependant pas à une analyse plus profonde. En effet, s'il est vrai que les marchandises fournies aux troupes étaient payées, elles l'étaient cependant toujours avec beaucoup de diffìculté et surtout avec beaucoup de retard. Ce fait représentait le plus souvent une perte pour les fournisseurs. Parfois une partie n'était meme pas payée à cause du système compliqué employé pour rembourser les sommes dues. En outre, la guerre avait causé une hausse continuelle des prix et une dévaluation de la monnaie. Ainsi lorsque les fournisseurs recevaient le payement des fournitures mili– taires, la somme reçue ne représentait plus la valeur réelle des mar– chandises cédées. Ces faits expliquent la résistance que les agricul– teurs ou les commerçants opposaient aux réquisitions ou aux de– mandes de fourniture de denrées. Le 27 avril 1794 le Conseil de la ville d'Aoste dut intervenir, par exemple, à cet égard pour obliger les marchands à ouvrir les boutiques qu'ils venaient de fermer. «Etant

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