- Academie de Saint Anselme - Nouvelle Serie - 01/01/1991

432 Lucienne Landi re! Si la pauvresse souffrait d'un lumbago ces jours-là (chose fort possible vu la grande diffusion cles douleurs rhumatismales chez no– tre population), tout le village la montrait du doigt et elle perdait ainsi ses pouvoirs maléfìques. Et s'il faisait du vent pendant plus de trois jours, c'était encore la faute aux sorcières qui avaient décidé de se réunir en sabbat en cles lieux éloignés et en avaient besoin pour se faire transporter. Il n'était alors de meilleur remède que de brlller un balai. Chacun sait que c'est en enfourchant tel instrument que les sorcières se déplacent et elles n'ont de pire chagrin que de voir porter atteinte à leur pare roulant, pardon ... à leur pare volant! Toutefois, pour etre à l'abri de tout maléfìce, il y avait une pratique au résultat assuré: il fallait faire manger du pain enfenouillé à la personne que l'on réputait une sor– cière. Avec l'odeur que répand le fenouil, je me demande comment l'on s'y prenait pour y parvenir sans que la personne intéressée ne s'en aperçoive ! Ce qui, de tous temps, a tracassé les fìlles c'est de s'interroger sur leur futur. En plus d'effeuiller les marguerites pour savoir si leur ga– lane les aimait un peu, beaucoup, passionnément ou pas du tout, les fìlles d'Issime. avaient l'habitude, la veille cles Rois, de piacer un bol d'eau sur leur fenetre pour qu'il gèle la nuit. Selon la forme que pre– nait la surface de la glace elles savaient lire si elles allaient célébrer leurs noces dans le courant de l'année ou si, au moins, elles allaient trouver un prétendant. Elles avaient meme inventé un système pour offrir au sort l'occasion de leur donner un coup de main. Tous les noms cles fìlles du village ainsi que ceux cles garçons avaient été écrits pendant la veillée sur cles billets qui avaient été placés séparé– ment dans deux chapeaux. Sur la place, après la grand-messe de l'Epiphanie, la mariée la plus récente tirait un billet de chaque cha– peau et formait cles couples. Chaque garçon, ce soir-là, était tenu à aller chercher à la maison la fìlle que le sort lui avait destinée pour l'inviter au bal. Quelques foyers sont bien nés ainsi, mais ce n'était pas toujours rentable. Et alors, que pouvait faire une fìlle pour manifester sa sympathie envers le beau ténébreux qui ne faisait pas de cas d'elle? Il ne lui res-

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