de Saint Anselme Nouvelle Série - Académie
Monseigneur Bailly et l'administration du Duché d'Aoste 137 quent, si les commis ne constituent que l'exécutif du Conseil général, leur naissance doit forcément remonter à l'origine du Conseil général, qui est inconnue puisqu'elle remonte à des époques immémoriales. Bailly introduit à ce point deux autres éléments, le parallèle avec les conseils de ville et la référence au droit des gens. Pour ce qui est du pre– mier, l'on ne peut que penser immédiatement à la situation de la ville d'Aoste. Les origines du conseil de ville du chef-lieu du Duché sont effectivement "inconnues", dans le sens qu'il est impossible, à l'heure actuelle, d'en retracer exactement la naissance et le développement, 13 routefois cette institution existe grace à des franchises accordées par les souverains de Savoie, de manière que la référence aux libertés dont jouis– sent respectivement la ville et le Conseil des Commis ainsi que le paral– lèle entre les libertés d'Aoste et les libertés du Duché sont, à l'époque, immédiatement compréhensibles. Quant au "droit des gens", il pose un problème intéressant: la distinction entre le droit civil et le droit des peuples- à partir de laquelle, au moment meme ou Bailly écrit, se déve– loppent les théories jusnaturalistes 14 - est un héritage du droit romain qui a persisté, avec peu de modifìcations, pendant le Moyen Age et meme au-delà. Cette distinction établit que le seul droit civil (ius civile) est le droit latin, car il caractérise uniquement le peuple vraiment civi– lisé, soit le peuple romain. Le droit civil comprend le droit positif, fondé sur des lois écrites émanées par une autorité constituée. Par contre, le droit des gens (ius gentium) est l'ensemble "des normes juridiques fon– dées sur la naturalis ratio, sur la raison naturelle présente chez rous les 13 Sur !es origines du Conseil de la Cité et Bourg d'Aoste, voir l'arride de A. CELI, Il Comune di Aosta dal Medioevo alla fine dell'Ancien Régime 1470-1770, in Il Comune di Aosta. Figure, istituzioni, eventi in sei secoli di storia, Aoste, Le Chateau, 2004, pp. 9-15. 14 Cette formule rappelle de très près le titre de l'ouvrage d'un des pères du jusna– turalisme, le lurhérien SAMUEL PuFENDORF, auteur en 1672 de De iure naturae et gen– tium. Il est iméressant de souligner que la plupart des théoriciens de cette doctrine poli– tique sont des protestants ou des réformés, élément qui pousse à croire peu probable une imerprétation jusnaruraliste de la formule urilisée par Bailly, bien que la vie du pré– lat co"incide chronologiquement avec celle de cerrains idéologues dont la position est proche de celle des jusnaturalistes, camme le français Gassendi (1592-1655) et son cer– cle, parriculièrement actif pendant la Fronde, époque pendant laquelle Bailly se trou– vait à Paris.
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