de Saint Anselme Nouvelle Série - Académie
Le discours prononcépar Mgr Albert Bailly 329 pied qu'on peut justifier la difference du stile, & des pensées des Fran– çois, & des Italiens. Les Italiens ont dans leurs discours quelque chose de l'élevation, & de la pompe des Asiatiques, leur stile marque leur humour, & le beau feu de leurs Esprits; ils étendent leurs pensées par de longues, & belles periodes, & aiment les figures comme font ceux d'Asie, mais ils y gardent beaucoup de modestie à l'exemple des Grecs; aussi sont-ils tout ensemble modestes, & innocemment amoureux de la belle gioire. Et pour les figures dont ils font un grand usage, ils croient le sofrtenir, & le justifier par plusieurs raisons. En voici deux qui me semblent les plus plausibles, & les plus fortes, et l l qu'un Auteur moderne 19 m'a pretées: Ils emploient pour la premiere cette maxime si commune, Que l'art perfectionne la nature; 20 & que comme il est des statues si finies que les beautés naturelles ne sçauroient leur etre comparées; de meme les pensées, & les paroles les plus propres ne peuvent souvent égaler la force, & la beauté des figures, quand elles sont bien choisies, & bien placées; & enfin ils disent que les figures marquent la grandeur, & la richesse de l'esprit humain qui effectivement est si vaste, & si fecond en connoissances nobles, & elevées, que meme un Dieu infini en est l'objet, parce qu'il est verité, & que la verité en generai peut etre connue de l'esprit humain. e esprit donc de l'homme, disent-ils, aiant quelque chose de divin, & d'immense, trouve steriles les langues les plus abon– dantes; & ainsi la nature ne pouvant pas fournir aux hommes assez de paroles pour exprimer les diverses formes, & les tours differens de leur pensées, ils sont obligés d'emploier les figures qui, selon leur nom, sont comme des signes par lesquels ils se font entendre, & qui suppléent au 19 Le renvoi est rrop vague pour temer une idenrificarion. S'agir-il d'un aureur fran– çais ou d'un aureur iralien? 2 ° Cetre maxime est retenue parA. FURETI!:RE, Dictionnaire universel contenantgene– ralement tous les motsfrançois tant vieux que modernes, et les Termes de toutes les Sciences & des Aw [...]. Nouvelle édirion corrigée et augmenrée, A La Haye età Rorrerdam, Chez Arnour et Reinier Leers, M.DC.XCIV, en 2 voli. r. I, p. 92: <<L art corrige & perfecrionne la nature>>. M . MALoux, Dictionnaire des proverbes, sentences et maximes, Paris, Librairie Laurousse, 1960, p. 43: <<Le secrer cles arrs est corriger la nature>>, d'après Volraire, Epi– tres, CV, 1769.
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