- Academie de Saint Anselme - Nouvelle Serie - 01/01/2012
PAOLO PAPONE pas renoncer à l'idéologie qu'y était liée: en contrepartie de l'autonomie, il demande de transférer les reliques de saint Maurice à Turin 124 • Les Valaisans, désormais peu catho– liques, n'auraient pas d'objections, mais la paroisse de Saint-Maurice d'Agaune n'est pas du tout du meme avis, elle n'accepte absolument pas de perdre san saint patron. Finalement un accord sera trouvé: Agaune gardera la partie principale du saint corps, tandis que Charles Emmanuel aura l'épée du primicier et moitié de ses ossements mi– neurs; si nous croyons au Baldessano, lorsque les reliques arrivent près de Turin et on les vérifìe, on y trouve «pezzi ventidue grandi, & venti piccioli di ossa [... ] alcuni del craneo, delle braccia, coscie, gambe, coste, schiena, & altre diverse parti del sacro & venerando corpo di detto S. Mauritio » 125 • La translation des reliques fut hative de l'ab– baye d'Agaune, par le col du Grand-Saint-Bernard, et jusqu'à la crypte de la Cathédrale d'Aoste (29 décembre 1590- l er janvier 1591), lieu d'élection pour y déposer transi– toirement les précieux restes, sur l'ancien aurel dédié à saint Maurice. Une perite chasse avait été préparée pour les ossements sacrés, et une autre plus grande pour protéger la perite; un chanoine porterait l'épée du Primicier. Présidé par Mgr Ginod, éveque d'Aoste, le cortège quitta en toute solennité la Cathédrale d'Aoste le 9 janvier 1591, et arriva à Turin le 15 janvier suivant; tout le long du trajet, les paroisses vinrent en pro– cession avec leurs curés au-devant du saint martyr pour le vénérer. Le retentissement de cet événement fut tel qu'en naquit la fete liturgique de la "Translation des reliques de saint Maurice", 15 janvier, fete solennelle dans tous les États de Savoie 126 • La dévo– tion à la Légion thébéenne reçut un nouvel élan, et voilà que, si nous comparons avec les données d'Eucher, beaucoup d'autres saints locaux, dont on ne connaissait que le nom, y furent enrolés post mortem. Dans cette perspective on peut mieux comprendre l'ceuvre de Baldessano, La Sacra Historia Te bea, qui eut une première édition en 1589 - c'est-à-dire juste avant la translation solennelle, dont elle pourrait avoir accentué la valeur idéologique - qui est une édition in SO de 325 pages, et une deuxième édition en 1604, de 530 pages in 4•, où l'an trouve aussi le récit de la translation et un nombre multiplié de légionnaires 127 • Nous avons parlé, c'est vrai, d'une opération idéologique, mais elle ne tient pas que d'une stratégie politique capable de manipuler la crédulité populaire; si elle a des résul– tats, c'est que les promoteurs sont aussi charmés que les destinataires. En effet Charles 124 G. BALOESSANO, La Sacra Historia di S. Mauritio Arciduca della Legione Thebea, et dé suoi valorosi compagni, Tarino, Torino 1604, p. 310-311, cité par DESTEFANIS, op.cit., p. 15. 125 HEA, 6, p. 279-281; BALDESSANO, op. cit., p. 16. I.:épée de saint Maurice (un objet du Xlii' siècle) et son étui (1 434-1438) sont gardés à l'Armeria Reale de Turin, c( C. BERTOLOTIO, fiche no 65, Arte franco-svizzera, 1434- 1438. Custodia della spada di san Maurizio, dans E. CASTELNUOVO, G. RoMANO (a cura di), Giacomo jaquerio e il gotico internazionale, catalogue de l'exposition (Torino 1979), Assessorato per la cultura, Musei Civici in Torino, Torino 1979, p. 301-304; Io., fiche no 19, Miniatore attivo alla corte di Savoia. Custodia della spada di San Mauri– zio, dans CASTELNUOVO, DE GRAMATICA (a cura di), op. cit., p. 448-449. 126 La Legione Tebea e S. Maurizio, protettore principale della Rea! Monarchia Sabauda, 1897, Archivio storico Città di Torino, Collezione Simeom, C 9157, p. 158, cité par DESTEFANIS, op. cit., p. 21 (pour la fece du 15 janvier, voir aussi p. 70-71). Informations complémentaires dans CENTINI, op. cit., p. 69-71. 127 ALESSIO, op.cit., p. 24-25. Bosco, op.cit., p. 109-110. 42
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