- Academie de Saint Anselme - Nouvelle Serie - 01/06/2012

RosANNA GoRRis CAMos « C'est vers ce but d'une Europe ethnique que la pensée et la culture valdò– taines fortes de leur droit, doivent s'acheminer avec courage et réalisme [ces mots courage et réalisme sont les mots-clés de l'homme Colliard], équilibre et sens de la mesure. C'est dans cette Europe, l'Europe qu'a revée le grand Érasme, que trouveront leur synthèse harmonieuse, leur accomplissement, leur apaisement, dans une homogénéité qui n' exclura plus les particularités, les labeurs féconds qui ont porté au XJXe siècle à la formation des États natio– naux et, au :xxe, au réveil de conscience des minorités ethniques. [... ] Ce processus [...] est irréversible. Ce sera, probablement, le grand fait du XXJ< siècle » 62 • Rechercher les racines de l'identité valdòtaine et les illustrer du point de vue his– torique, voilà le seul but d'une carrière qui fait honneur à un homme qui a su, nonobstant ses centaines de publications, garder intact son sens de la réalité, samo– destie (dans le sens noble du mot), son honneteté intellectuelle, sa rigueur morale. Souvent il a préféré le silence à la vaine polémique, mais il n'a jamais renoncé à son sens critique, à sa lucidité; il a préféré la sagesse de Montaigne au fìel, à la rancune qui sépare et qui dévore. « l:Europe des ethnies, sur l'exemple suisse », écrit Lin in L'identité va/dotaine: quelques réjlexions (25 mai 1996) - des pages de grande lucidité politique, intel– lectuelle et morale - « ne peut que demeurer un élément de liaison, d'entente et d'ouverture, tandis que l' ethnocratisme [...] borné, égoi'ste, stérile, dernier reflux du provincialisme, est voué à l'échec » 63 • « Élucider au préalable les fondements sur lesquels cette identité est assise ce n'est pas faire du passéisme; bien au contraire, il s'agir pour nous d'un impératif moral et catégorique » 64 ; et je souligne ces deux adjectifs: « moral » et « catégorique », des adjectifs qui nous révèlent beaucoup de la personnalité de cet intellectuel, apparemment réservé, fragile, mais dur et fìer camme l'un de nos rochers. Lin Colliard, en effet, tout en ne s'enfermant jamais dans la tour d'ivoire a su garder un regard désenchanté, parfois critique, parfois amer, mais aussi son sourire, son ironie, son rire, diraient Rabelais ou Érasme, « sardonien », devant la folie ou les fo– lies du monde. Entre Démocrite et Héraclite, Colliard ne choisit pas, il sait garder le juste milieu, entre le rire et les larmes, et son sourire gentil, derrière des mots et des façons parfois un peu bourrues ou distantes, cache parfois son sage éloignement 62 Ibid., p. 677. 63 CoLLIARD, L'identité valdotaine... , ci t., p. 7. 64 Ibid., p. 5. 74

RkJQdWJsaXNoZXIy NzY4MjI=