- Academie de Saint Anselme - Nouvelle Serie - 01/06/2012

LEs rNTÉRÉTs MusrcAux DE LIN CoLLIARD Suivant leur propre schéma traditionnel, ces chants se présentent en forme anti– phonique: le chreur, formé de voix masculines, alterne dans les différents versets le chant monodique, de claire origine grégorienne, aux épisodes polyphoniques. Les parties monodiques s'inspirent, tout en possédant cles variantes et cles modi– fìcations, cles formules cles chants de psaumes grégoriens, soutenues par le son de l'orgue qui prépare l'entrée simultanée de la polyphonie. Celle-ci, en utilisant la formule psalmodique comme une sorte de basse, l'harmonise avec deux voix supé– rieures procédant par intervalles de tierce, de sixte (et parfois, de quarte). En ce qui concerne le rythme et le phrasé, normalement ce répertoire obéit à un code populaire qui dépasse les normales divisions métriques de la musique cultivée pour privilégier une construction de la phrase et une technique d'articulation s'adaptant aux éléments rythmiques et mélodiques qui composent la pièce. La sonorité aussi, plutòt incisive, homogène et monotone, caractérise le chant « ouvert », très lent, qui souligne un moment privilégié de l'expression artistique collective, insérée dans un contexte liturgique solenne!, où la voix met en évidence sa puissance, sa capacité de suggestion, sa valeur symbolique. C'est par ces caractères qu' on perçoit la sensa– tion d'une élaboration structurelle s'appuyant sur les points saillants de la mélodie, selon le style propre à la tradition populaire profane aussi 10 • Le Kyrie tropé est, au contraire, une pièce de plain-chant, d' abord étudié par Col– liard 11 , qui témoigne de la présence, dans le rit valdòtain, de l'usage d'ajouter cles tropes à certaines parties de la Messe, notamment le Kyrie et l'Alléluia. Dans l'his– toire de la musique médiévale la pratique, qui se développa entre le XJc et le XJIIe siècle surtout, d'insérer une interpolation d'un texte religieux dans une mélodie gré– gorienne, ou bien la création d'un nouveau texte et d'une nouvelle musique s'ajou– tant aux mélismes grégoriens de certaines parties de la Messe, nait de l' exigence créative cles musiciens ecdésiastiques à l' époque de la renaissance carolingienne. Et eneore elle est engendrée par le gout d'amplifìer les cérémonies liturgiques, ou eneore, par la nécessité d'éclairer la complexité cles textes avec cles paraphrases et cles additions adaptées pour les fìdèles, dans le sens d'un éclaircissement cles vérités de la foi. Certe pratique crùt sensiblement et fut adoptée dans plusieurs parties de la Messe, à un tel point que ces interpolations furent ensuite supprimées par le Concile de Trente (XVIe siècle) 12 • La pièce en question témoigne clone de certe l O Liber Usualis... ci t. Il L. CoLLIARD, Un Kyrie tropé en ttsage dans le rit valdotain, in "Recherches", II (1970), pp. 33-35. 12 G. M. DREVES, C. BLUME, Analecta hyrnnica, volumes 47-49, Leipzig 1905-1906; U. SESINI, Poesia e musica nella latinità cristiana dal III al X secolo, Torino, SEI, 1949; W. LrPPHARDT, Kyrietropen, in "Kongress Be– richt", Liineburg 1950; B. ST.ii.BLEIN, Zurn verstiindnis des klasssichen Tì·open, in "Acta Musicologica", 1963; H. HusMAN, Tropen und Sequenzen Handschriften in "Répertoire imernational d es sources musicales", 1964. 81

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