- Academie de Saint Anselme - Nouvelle Serie - 01/01/2013

FÉLICIEN GAMBA, UN HISTORIEN MÉCONNU Une conception moderne de l'histoire Le pian de la grande histoire du mandement de Montjovet montre, malgré tout, que Gamba a tenu compte de quelques-unes cles nombreuses suggestions de son ami. Toutefois, on doit remarquer qu'entre les deux compatriotes il y a une concep– tion différente dans la façon d'aborder l'histoire. Si Gamba déclare que son ceuvre ne pouvait ètre que « le fruit d'un modeste enfant du peuple », et cette attitude le rapproche à Trèves, par ailleurs les buts que son travail devait rejoindre divergent. Pour l'abbé, en effet, l'histoire a un triple objectif: culture!, politique et religieux. Tout en étant fondée sur la rigueur scientifique puisée aux sources documentaires, elle doit s'adresser à un public le plus vaste possible afin de lui procurer la connais– sance du passé et pour que le peuple n'ignare pas ses racines; d'autre part, elle doit ètre aussi un moyen d'affirmation et de revendication valdotaines et régionalistes ; c'est-à-dire, qu'elle doit conduire le lecteur à une prise de conscience cles valeurs impérissables sur lesquelles le citoyen bien formé puisse batir l'avenir de son Pays. Cela, d'après l'abbé, est d'autant plus nécessaire au moment où le régime fasciste ceuvrait pour effacer tout particularisme 73 • Mais la recherche historique doit aussi transmettre à la jeunesse « ces saines traditions religieuses et civiles valdotaines in– dispensables à son salut temporel et éternel » et elle est « un moyen cles plus efficaces pour défendre notre Foi catholique, un véritable apostolat auprès cles générations présentes et futures » 74 • La position historiographique de Gamba est une autre : l'histoire est élaguée de toute finalité politique et religieuse ; de plus, elle s'adresse surtout, si ce n'est exclusivement, aux spécialistes. Sa lettre du 19 juin 1927 à l'abbé Trèves, déjà citée, est révélatrice à l' égard de ses idées sur la recherche historique. En premier lieu, Gamba était contre la publication fragmentaire cles recherches, tant les siennes que celles d'autrui. « Combien de nos historiens de valeurs- écrivait-il- se sont perdus dans !es débats des revues, opuscules, articles de journaux, Bulletins nationaux ou étrangers et n'ont pas, malgré leur sure compétence, formé un travail organique d'histoire valdòtaine, qui est une reuvre, au point de vue historique, bien plus durable que la gloriale qui consume et brise leur activité en petits fragments. Le cas du chanoine Frutaz enseigne » 75 • 73 I.:histoire est conçue par l'abbé « ava m tour comme nene, franche, impaniale affirmation régionaliste valdò– taine , et comme le remède et l'amidote à l'action du régime fasciste « car le nivellement qu'on veur réaliser est compier et l'ostracisme à notre langue et cachet valdòtain morrei dans les intentions et aurant que pos– sible dans l'exécurion ,, a-t-il écrit dans la !eme du 25 juillet 1927 à Félicien Gamba. 74 J.-M. TRÈVES, Écrivons l'Histoire de notre Paroisse, in Recueil de textes Valdotains (Écrits de l'abbé J Trèves), III, Aoste, Imprimerie Marguerettaz, 1967, p. 118 et p. 154. 75 Gamba craignait aussi qu'en anticipane des épisodes de son histoire, le « byzantinisme, cles critiques liné- 109

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