- Academie de Saint Anselme - Nouvelle Serie - 01/01/2013

AsPECTS PHILOSOPHIQUES DANS ÙEUVRE DE}EAN-BAPTISTE GAL (1809-1898) tude philosophique 10 • Une discussion préliminaire sur l'approche méthodologique adoptée par Gal dans san ceuvre est clone nécessaire. Dans l'ex-ergo juste énoncé, il prend ses distances en meme temps de la métaphy– sique et de la psychologie. Ces deux disciplines, déjà au milieu du XIX< siècle, traçaient leurs études avec deux attitudes très différentes, en ligne avec ce qui se passe aujourd'hui aussi. Les métaphysiciens étaient célèbres pour faire cles discours abstraits, qui connectent les idées les unes aux autres, sans tenir trop compte de la situation réelle cles choses 11 • Les psychologues, d'autre part, avaient une atti– rude personnaliste, et fondaient leurs discours sur l'expérience pratique du sujet humain. Gal tient à se démarquer de ces deux méthodes d'étude. Sa méthode de recherche, nous tenons à le préciser, est d'un type différent. << I.:étude du cceur humain se fait à près camme la collection d'un herbier. Lamateur qui veut herboriser prend la première piante qu'il sait manquer à san herbier, sans s'occuper de la famille, et continue ainsi jusqu'à ce qu'il ait complété sa collection. Celui qui veut étudier le cceur humain doit agir de meme. Il observe tout ce qu'il entend, tout ce qu'il voit, il prend note de tout, il collectionne, se réservant plus tard de classifier !es données qu'il a recueillies. Ce travai! d'observation peut se faire partout. On examine !es hommes à table, en conversation, au jeu, à la promenade, en voyage, à la bourse, au théatre, sur la piace publique...Dès qu'on a fait quelques progrès dans cette étude on trouve des données qui peuvent s'appliquer à tous !es hommes, telle que l'amour de la liberté individuelle, l'amour-propre, etc. >> 12 • I..:attitude de Gal est clone similaire à celle d'un naturaliste. Pensez à un explo– rateur qui pénètre dans la foret pour dessiner dans son carnet le profìl d'un ani– mal rare, duquel il réussit à saisir à chaque fois seulement quelques détails, avant 10 À ce faiton doir ajouter l'attitude méfianre de Gal par rapporr à la philosophie, considérée souvenr une dis– cipline difficile et compliquée. Voir par exemple la maxime suivanre: «Il en esr peu qui aimenr !es ouvrages philosophiques, parce qu'on n'a gout que pour ce que l'an comprend »(GAL, Les impressiom de la vie, précé– dées... cir., p. 263). Cependanr, camme on verra dans !es pages suivanres, la philosophie est pour Gal aussi un patrimoine de savoir auquel atteindre, au besoin, pour fortifier !es thèses sourenues. 11 Gal avair sans doure des connaissances direcres des méraphysiciens, mais de la métaphysique "tradition– nelle", er non des kantiens ou hégéliens ses conremporains. En consultant le caralogue de sa bibliorhèque, par exemple, on voit qu'il possédait différenrs "classiques" parmi lesquels !es CErtv~·es philosophiques de Des– cartes, et la République de Plaron. Si on compare ce dernier texte avec l'analyse de la sociéré proposée par Gal, on trouve une différence substantielle. Dans le dialogue plaronique, en fait, Socrate essaie de penser aux caracrérisriques de l'érat idéal, en réAéchissanr en abstrait à partir de quelques principes conducteurs (l'égalité enrre !es ciroyens, la nature de l'homme en général, er ainsi de suire). Gal au conrraire commence roujours à partir de fairs de la sociéré civile, desquels il cherche !es rrairs significatifs capables d'en expliquer l'origine er le fonctionnemenr. Ce n'esr pas donc un cas si la république définie par Plaron présenre beau– coup de caracrérisriques similaires à l'étar communisre, qui au contraire, comme on verra, esr pour Gal une image impropre de la sociéré civile, fausse car rrop absrraire er éloignée de la vraie nature humaine. 12 GAL, L'homme... cir., p. 10. 71

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