BASA

XVI ACADÉMIE SA!NT ANSELME Le jour venu, la jeune fille se pare comme une fiancée pour l'autel du mariage. Elle s'avance au bras de son père. Sa robe blanche est émaillée de fleurs - les fleurs du monde - ; une couronne de roses ceint son front. Se~ parents, tous ses bien-aimt>s la suivent. Arrive processionnellement la Confrérie de la miséricorde. Quand elle est devant l'autel: «Ma fille, lui demande le Prieur de la miséricorde, que désirez vous ? » Elle, d'une voix émue : « La grâce de me donner à Dieu pour toujours » - « Que Dieu vous l'accorde ». Et il lui tend la robe de bure, la corde noueuse qui va serrer sa taille. Et tandis quP les chants reprennent elle s'en va.... Sa robe de soie, ses dentelles, ses bijoux, ses fleurs tombent. Elle revêt la robe grossière: « Ma fille, lui dit l'abbé ou l'abbesse, que Dieu dépouille votre cœur de l'amour du siècle, et qu'il y répande les saints désirs de la vie qui ne finit pas ~ en même temps l'acier des ciseaux grince et les cheveux de l'épouse du Christ tombent. Elle revient bientôt, précédée de la procession, un grand cru– cifix dans les bras: « Ma fille, lui demande encore l'Abbesse, per– sévérez-vous dans votre désir ? » - Oui, je veux me séparer du monde pour toujours - « Amen ~ répond le chœur ému. Elle se couche alors, tout au long, les bras en croix, les lè– vres sur les pieds du Christ crucifié, sur le drap funèbre étendu devant l'autel. La cloche tinte lugubrement, le chœur chante des litanies et le prêtre, sur la morte au monde, répand l'eau bénite et l'encens des tombeaux. La jeune sacrifiée se relève enfin, le prêtre ou le prieur de la miséricorde lui met sur la tête dépouillée une couronne d'épines ; ainsi parée, ainsi couronnée, le crucifix toujours dans ses bras, l'épouse du Christ immolé, au chant du Te Deum s'avance dans sa cellule lugubre, bientôt les chants s'éteignent, la porte roule sur les gonds, elle est scellée. C'en est fait! la jeune fille n'est plus de ce monde. Dans les siècles de foi, les reclus et les recluses n'étaient pas rares. M. le Comte nous assure qu'il en existe en– core de nos jours et qu'il en a trouvé à Assise même.

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