BASA
Académie Saint Anselme 171 le paysage qui m'est si cher et qui m'est devenu si fami– lier, ce que je vois n'a pas changé; les maisons des horr•– rnes seulement se sont multipliées et gâtent ce paysage qui était si beau. Le regard ne peut plus se poser comme autrefois uniquement sur les beautés de la nature, sur ces prés qui s'étendaient jadis en dessous de la bourgade et oui étaient d'un vert si parfait. Mais au dessus de ces horribles toi+ures je retrouve encore le vieux donjon d'Us– sel et au dessus de la bourgade de St-Vincent les champs et les forêts d'Arnay et d'Emarèse gardent toujours la poé– sie d'anfan. Sans fin, à mE-sure que sonnent les heures dans ces ressouvenances où ie me plais, mon esprit doucement suit sa courbe. Je laisse longuement courir mes regards sur les contours familiers des bois, des côteaux et des cimes. Je cesse de les voir, ma contemplation va plus loin. Te me dis : de tout temps ces choses sont là et furent telles : ces arêtes, ces bois, ces moutonnements de rochers. Tou+ cela était avant que je fusse et continuera après moi iden– tique et pareil à voir. Ma rêverie alors m'insère dans h temps , moi le passant d'un jour au milieu des choses qu i durent. Mais la curiosité s'éveille et d'après le peu connu de moi, ce peu que nous savons de ce qui nous est même le plus cher, laissant l'heure présente, à imagine r ce qui était ici avant moi, ce que d'autres ont pu voir d 0 cette même place où ils se plaisaient et où il n'ont fait que passer eux aussi. Je pense à cette longue lignée des Challan!, autrefois si nombreux, dont j'ai réussi à glâner dans les archives ouelques b ribes de souvenirs, quelques épisodes saillants de leur histoire ! Mais qu'ont-ils fait tous ceux dont l'his– toire est muette? Car parmi le petit nombre de ceux oui ont atteint une renommée, combien ont vécu une vie pai– sible et sans histoire. « Senza infamia e senza lodo », pour
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