BASA

Acad~mie Saint Anselme 229 ce qui est nécessaire à sa vie, visages burinés par le vent des cimes et tannés par le gel ou le terrible soleil d'août. Peu à peu il sentit, il comprit que son monde à lui était celui-ci. Monde composé de petites gens, de coeurs sim– ples, d'humbles, de résignés. A l'époque Saint-Vincent commençait tout de même une lente métamorphose largement facilitée par le chemin de fer qui la reliait depuis une dizaine d'années à Turin. La renommée des vertus de ses eaux minérales se répan– dait un peu partout en Italie. Les touristes venaient cha– que année plus nombreux et plusieurs d'entre eux, séduits pm l'aménité du paysage, faisaient construire les pre– mières villas au milieu des bois de châtaigniers et des grands noyers qui faisaient une verte parure à la bour– gade. Peignant sans relâche, méditant et perfectionnant son style, il commença à exposer quelques toiles au milieu de la curiosité de ses concitoyens et de l'indifférence po– lie des estivants, trop occupés de leur foie ou de ieur intestin pour trouver le temps d'apprécier l'originalité des premiers feux de cette expression d'art nouvelle. Comme le conseil de révision a renvoyé d'un an son appel sous les drapeaux, il profite de ce répit pour aller à Lyon où prospère une colonie d'artistes active et dy– namique. Il y butine ce qu'il juge nécessaire et, six mois après, part pour Lausanne, toujours dans le même but de s'instruire. Paris l'attire, mais il se sent trop «sauvage>, trop individualiste pour aller s'enfermer dans cette ruche bourdonnante et où les éclats ne manquent pas. Il a be– soin de ses montagnes et il lui faut, le soir, pouvoir con– templer la chaîne· des Alpes pour s'endormir tranquille. C'est en Suisse qu'il accomplit son premier grand travail: les fresques d'une petite église près de Fiesch à Brigue.

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