BASA
230 Acad~mie Saint Anselme Le séjour suisse aurait pu continuer encore s'il n'y avait le service militaire à accomplir. Il est encore sous les drapeaux que la guerre éclate en 1915. Ce contemplatif, ce doux artiste a été affecté aux premières lignes en qualité de brancardier. Ce sont de durs moments, l'horreur de la boucherie, l'horreur de la guerre, d'une guerre atroce, longue, que l'on poursuit à moitié enterré dans les tranchées, l'homme étant revenu aux premiers âges de l'humanité, au temps des cavernes presque. Ces spectacles épouvantables, Mus ne les ou– bliera jamais. Cette tragédie dantesque, sa sensibilité :::l'artiste l'enregistre fidèlement. Il voit là, il touche de ses mains, lorsqu'il relève les corps de ses camarades bles– sés sur le champ de bataille labouré par l'éclatement des obus, l'atroce condition humaine, la vanité d'une civili– sation qui ne travaille que pour mieux détruire, n'exploita les découvertes de la science que pour les appliquer d'a– bord à l'extermination, lamentable rocher de Sisyphe dont les bénéfices sont sans cesse remis en cause. Ces années marqueront définitivement Italo Mus et dé– cideront formellement de son orientation future. Là, dans les tranchées, il a retrouvé ses paysans simples et peu loquaces, il a vécu la vie de ces enfants de la glèbe qui ont troqué la faux pour la pelle-bêche, agrippés à cette terre qu'ils ne connaissent que trop bien et qu'ils ont mission de défendre, sans trop en comprendre les motifs pour la plupart, mais qu'ils défendent farouchement tout de même comme s'il s'agissait de leur lopin de terre per– sonnel. Ces visages fermés, durs, aux barbes broussail– leuses, il les connaît bien et de temps à autre, pendant les moments d'accalmie, l'envie de les peindre est plus forte que lui. Il saisit ses pinceaux et s'évade pour un instant de cet enfer. Un jour, tout à son travail, il n'a pas entendu arriver un important personnage. C'est le géné-
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