BASA
232 A cad~mie Saint Ânselme Une fois démobilisé, il revient à Saint-Vincent, se maria et commence à exposer dans une sorte de magasin qui lui sert à la fois d'atelier et de pied-à-terre. Il est plus décidé que jamais à ne se mêler à aucune « école ", fuyant ses confrères, cherchant sa voie tout seul, véritable « ours », comme il dira lui-même en plaisantant plus tard. Sa sensibilité avivée par le drame qu'il vient de vivre pendant ces longues années de boue, de sang et d'épou– vante, il se sent de plus en plus attiré vers ces petites gens du peuple, ces humbles paysans qui ont supporté le poids le plus dur de la guerre. Ce sont des années d'épanouissement spirituel, Là, dans cette ample conque de Saint-Vincent, là où la Vallée d'Aoste forme comme une sorte d'embrassement câlin, sem– blant dire à l'homme: «Où pourrais-tu être mieux qu'ici? Tu vois, je me creuse, je m'arrondis et te protège avec mes hautes montagnes qui ne gênent cependant pas ta rêverie, car il y a de l'espace libre ici, il y a place pour tes rê– ves ! », là Italo Mus put prendre tout à l'aise la juste me– sure de son pays, créer cette délicate symbiose de beauté et de rudesse, donner enfin l'interprétation exacte du songe intérieur qu'il caressait en lui depuis longtemps. Car, ne nous y trompons pas. Si quelqu'un, dans le do– maine de l'art, a profondément senti l'âme valdôtaine, c'est lui. Si quelqu'un a pu, traduisant en clair ce don reçu à la naissance, rendre les mouvements de l'esprit valdôtain en ce qu'il a d'éternel et d'immuable, c'est bien lui. Si la révolte résignée d'un peuple, tracée sur la toile, avec toute sa densité dramatique, silencieuse et pourtant parlante, ô combien !, a été enregistrée à jamais pour la postérité, c'est encore grâce à lui. Car Italo Mus, vivant à l'écart et en dehors de toute chapelle, est en fait un doux révolté. C'est là-dessus, sur cet aspect particulier de son art, qu'il
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