BASA

52 M. DURAND Les élève;; de cet Institut, tout en croyant connaître la grammaire française, étaient de l'aveu même des con– temporains, dans une ignorance de la syntaxe poussée jusqu'à ce point où elle mérite le nom d'ignorance crasse. Qu'on relise les compositions de ces temps-là, si elles existent encore, et l'on verra qu'elles foisonnent de solécismes et des plus gros. Hormis ceux qui par– laient le français en famille, combien étaient réduits à se servir de l'italien dans leurs correspondances, car ils auraient eu honte d'écrire dans leur langue mater– nelle ! Le fait était là, indiscutable. Quant à un certain nombre de nos intellectuels, grâce à des circonstances exceptionnelles, ils avaient étudié la grammaire après le Lycée, et étaient parvenus à l'ap– prendre assez bien et à écrire assez correctement sinon toujours élégamment. Parlons-nous du Petit Séminaire d'alors ? Ici bais– sons la voix et permettez-nous de faire une confession à l'oreille : ceux qui ont eu occasion de s'entretenir avec quelques-uns de ces élèves ont dû froncer les sourcils et s'écrier: désolation ! Ils baragouinaient le français comme nous écorchons l'allemand. Ce n'est que depuis 1890, que l'enseignement de notre langue y fut reconstitué sur de nouvelles bases et s'y maintint à un niveau assez élevé grâce à des professeurs très compétents. Pourquoi cette décadence, cet état de choses dont nous parlions tout à l'heure ? Parce que l'on suivait dans notre Collège un système piteux: on enseignait les premiers éléments de la grammaire dans les trois pre– mières classes du gymnase comme on enseignerait une matière qui dût recevoir plus tard un développement plus complet. Mais les temps étaient changés, l'italien prenait la place du français qui disparaissait de la scène. Plus tard arrivait le nrofesseur de littérature. Celui-ci ne pouvant disposer que d'une heure ou deux par se– maine, ayant le droit d'ailleurs de supposer aux élèves une instruction grammaticale suffisante, s'occupait exclu– sivement de r-on programme, et les élèves achevaient