BASA
NOTRE LANGUE FRANÇAISE 55 grammaire française n'est que la continuation et le prolongement de la grammaire latine ; par suite les ad– jectifs de l'ancien françai s suivent en tous points les adjectifs latins, c'est-à-dire que les adjectifs qui avaient chez les Romains une terminaison différente pour le masculin et le féminin (bonus, bona ; magnus, magna, etc.), avaient aussi deux terminaisons différentes en français, et que ceux qui n'en avaient qu'une pour les deux genres (grandis, forti s, humilis , etc.) , n'en n ' avaient plus qu'une dans l ' ancien françai s : on di sait au 13me siècle une grand femme (grandis) , une âme immortel (immortali s), nne plaine vert (viri– dis) , une .fille cruel ( crurl elis). Le 14.me siècle , ne com– prenant plus le motif de cette anomalie, y voyant une irrégularité, a ssimila à tort la deuxième classe d ' adjectifs à la première , et. contraireme nt à 1' étymologie, écrivit: grande , immortelle. verte , rruelle, comme il écrivait bonne , etc. Cependant une trace de la formation cor– recte est restée -dan s les e'Xpressions 7rand' mère , grand' route, grand' faim , r.zranrl ' peine, grand'peur , grand'mes– se, qui Ront des débri s du parler ancien. Au l 7me siècle , Vaug~la s et les grammairiens du temps, ignorant la rai son hi storique de cet usage, décrè– tèrent avec aplomb que la form e de ces mots, que nous avons signalés, résultait d'une suppression euphonique de l'e muet, et qu'on devait marquer cette suppression par une apostrophe. Il n'en était rien. De même il est expédient de connaître par quelle évo– lution le mot latin ; st passé dan s le fra~çai;. Prenons le mot âme, nous voulons en cherche r l'origine, voire l'histoire du mot. L'accent circonflexe qui surmonte l'a indique la suppression d'une lettre. Dans les textes du Xe siècle notre expression n ' est plus âme mais anme ; au XIe siècle , il est devenu aneme ; au XIIe siècle nous ne trouvons plus que la forme anime, qui nous conduit sans hésitations ni tâtonnement au latin anima. Au prime abord, la distance paraît grand e d'âme à anima, du français de Voltaire an latin du paysan ro– main ; et pourtant pour faire celui-là avec celui-ci, il a
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