BASA

LE POETE ANSELME PERRET 135 disparaître, toute puissance à redevenir tôt ou tard pous– sière. Notons la subtile ironie de ces mots: « perle », « glissent », « siffle )) , et plus encore de « folâtre >>. Cette strophe prépare la finale de l'ode, dont l'envol s'élève vers les hautes sphères de la poési~. Pendant un instant le poète éprouve une profonde et vive pitié pour ce colosse solitaire qui lutte depuis des siècle;; contre la mort, qui s'efforce désespérément de survivre à l'anéantissement du Forum et de l'am– phithéâtre. Le poète oublie pour un instant qu'il est un descendant des vieux Salasses ; il s'approche du géant et il ne voit plus en lui qu'un enfant apeuré, éga– ré dans une foule hostile , dernier témoin à contempler, sur cette terre étrangère, les cendres de ses frères: Enfant du Latium, fourvoyé parmi nous, Etrange spectateur des cendres de tes frères Emu, le descendant des vieux Salasses se réconcilie ainsi avec « l'enfant du Latium >>. Mais voilà que sou– dain reparaît la méfiance ancestrale, et il demande: Comment nous juges-tu, dans tes pensers austères ? Cette défiance est provoquée en lui par les amers soupirs séculaires qu'il lui semble entendre parfois, le soir, en passant devant le rouge socle du géant solitaire: J'entends parfois, passant près de ton socle roux tes âpres soupirs séculaires. Mais aujourd'hui tout motif de méfiance, de ran– coeur, de haine a disparu. Aujourd'hui, tous unis en un même destin, vainqueurs et vaincus sont devenus des frères devant Celui qui sur la croix ouvre largement les bras comme pour réunir dans une même étreinte sur le sein du seul Père véritable du genre humain et les vainqueurs cruels et les vaincus mis en déroute. Et voici la dernière strophe, très be1le dans sa composition, qui présente en cinq vers cinq attitudes lyriques, diffé– rentes: tout d'abord un sentiment de pitié pour l'an-

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