BASA

LE POETE ANSELME PERRET 141 nature grandiose, devant ce royaume de neige:;; éter– nelles et de rocs. A chaque royaume il faut un maitre: dans l ' immensité des cieux , c' est l ' aigle, parmi les gla– ciers et les précipices interdits à l'homme, c' est Je fier bouquetin, aux <<bonds gracieux )), au «front encorné >) , au « bel oeil vivace )), qui « vole sur la glace )), qui pose sürement « sur tous les pics son pied audacieux )), pas– sant « comme un roi majestueux de l'alpestre désert )), « lion de nos glaciers , vainqueur de la tourmente l> ·– une tourmente qui trop souvent a raison de l ' homme inutilement orgueilleux et audacieux. Que de cl10ses l'homme ignore ! En vain il scrute l'horizon, interroge la nature, étudie les éléments, avec un sentiment de ter– reur , alors que le bouquetin , lui, contemple sans effroi Ja nature en fureur: Si l'avalanche gronde au fond du noir ravin, Si les vastes glaciers hurlent dans leurs abîmes, Si le sourd ouragan passe, ébranlant les cimes, Tu n'as pas un frisson, ô mon fi er bouquetin, Que bercent ces fracas sublimes. On notera le caractère solennel et harmonieux de ce dernier vers, qui, par ses allitérations, semble apaiser les éléments déchaînés de la nature et en faire une ber– ceuse pour cet animal intrépide qui a malgré tout une faiblesse: sa crainte de l'homme, de l ' homme si faible mais si cruel , si misérable mais si impitoyable , toujour s prêt à abattre de ses plombs cet amant des pics escarpés, ce vainqueur de la tourmente et de l'avalanche. De l'homme tout est à craindre: son pas furtif déjà est trom– peur, le bouquetin le sait: Tu gravis aussitôt ta roche solitaire 0 to.i, qui, sans frémi.r, entends l'affreux tonnerre, Te voilà donc soudain timide et fugitif, Si notre pied frappe la t erre. Il connaît la traîtrise de l ' homme et c' est pourquoi il Je fuit , plein de terreur ; mais il arrive qu'il ne fuie

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