BASA
NOS ANCETRES LES CELTES 85 giques sont ainsi un instrument précieux pour remonter aux premiers défrichements du sol. Derby, par exemple, contient le déterminatif celtique Der = chêne, forêt. Le col de Joux (Brusson) tire son étymologie de la racine elle aussi cel– tique juris signifiant « hauteur boisée » ou « forêt en mon– tagne», la même qui a donné Jura en France; Valdigne vient de Vaudagne, mot celte signifiant forêt de sapins; Bard de bar-barra = extrémité boisée; Ussel d'uxello = lieu élevé ... 11 Ces appellatifs et d'autres encore qu'il nous paraît inu– tile de mentionner sont très anciens, bien antérieurs à la cul– ture de la Tène . On voit par là l'intérêt que présentent aux chercheurs méthodiques certaines disciplines auxiliaires de l'histoire quand l'archéologie et les textes des auteurs latins et grecs, qu'il faut d'ailleurs toujours prendre avec les pin– cettes, n'arrivent pas à nous documenter avec une précision suffisante. Un autre argument que nous pourrions invoquer en fa– veur de l'opinion soutenue ici est la présence d'un cromlech au Petit-Saint-Bernard, construit très vraisemblablement, comme nous avons déjà dit en note, au premier âge du fer 12 • Nous serions loin d'être fantaisistes en affirmant que les hom- (11) A ne pas confondre avec le M ont Joux (Grand-Saint-Bernard) . ou la Col onne Joux (Petit-Saint-Bernard), noms de localités qui tiren t leur étymologie de Jupiter, le dieu suprêm e des anciens. Près des cascad es du Rutor, il existe un hameau nommé La Joux, situé lui-aussi sur une hauteur boisée. Ces exemples pourraient conti– nuer. Rappelons aussi - ce qui est en core plus Intéressant - que la lan– gue française possède une centaine de radicaux dont l'origine celtique est certaine (cf. Albert Dauzat, La T oponymie française, Fayot, Paris 1946, p. 10), le double en comptant au ssi ceux qui se sont maintenus dans les dialectes mais ont disparu du langage littéraire. On les retrouve en bonne partie dans le patois valdôtain (cf. Mgr Duc, Histoire de l'Eglise d'Aoste, to– m e · X, p. 211 ; Joseph Henry, Vieux n om s patois de localités valdôtaines, Le Messager Valdôtain , 1937-1938-1940; Joseph Bréan, Vestiges de la langue celtique dans les patois de la Vallée d'Aoste, revue « Le · Flambe·au », été 1951, p. 17 et suiv., hiver 1951, p. 124 et suiv. Ce dernier auteur, cepen– dant, n'est pas toujours précis. Il fait dériver, par exemple, le nom de la Doire . du gaulois Dubron = ruisseau, cours d'eau, tandis qu'il vient du radical préceltlque dor, dur = e-au ; balma ou barma pourrait d ériver aussi bien du ligure que du ~eltique; berio vient plutôt de l'ibère; la particule are est pré-indo-européenne. Vaudagne a été très mal latinisé au Moyen Age en Vallis digna, par les tabellions et les notaires, puis francisé posté– rieurement en Vàldigne. Vallée digne n 'a pas de sens. Il y a eu ici une ~ttraction paronymique tardive, lorsque le sens originel du mot n•a plus été compris: ... Vaudagne ... Vallis digna ... Valàigne. (12) La datation est de Piero Barocem dans Forma Italiae, Regio XI Transpadana, volumem primum, Augusta Praetoria, col. 2, Roma 1948. 9
Made with FlippingBook
RkJQdWJsaXNoZXIy NzY4MjI=