BASA

98 L. -A. Colliard Ce qu 'on ne connaissait pas très bien jusqu'à présent, c'est ce qui appartient en propre à Bernanos dans cette « genèse » exceptionnelle d'un chef-d'œuvre tributaire de divers apports et principalement de celui de la romancière allemande. Grâce à l'ouvrage critique La Génèse de « Dialogue des Carm( lites» de S. Meredith Murray, O.P ., qui vient de paraître aux Edi– tions du Seuil, Paris, on est désormais à même d'en juger. Dans son étude très documentée, S. Meredith Murray ne se pro– pose pas de comparer les mérites de l'une et de l'autre auteur, et encore moins de limiter le droit de création première de Mme Gertrude von Le Fort, mais vise plutôt à préciser, par l'étude comparée des textes , la façon dont Bernanos a modifié les données (scénario et nouvelle), en y apportant avec son interprétation personnelle une différente résonance spirituelle, et à déterminer la nature et la portée de son originalité. H istoire du livre de Bernanos. C'est en 1947, après qu 'il s'est installé avec sa famille à Gabès (Tunisie) , qu'on demande à Bernanos d'écrire 4 le dialogue pour un film tiré d'une nouvelle d'une romancière allemande, Gertrude von Le Fort 5 , qui a cédé ses droits d'adaptation cinématographique . Bernanos croyait écrire ces « dialogues » rapidement 6 : or il lui a fallu plus de cinq mois pour les achever 7 . Mais pendant qu'il est à (4) D 'après le scénario rédigé par le R.P. Brückberger et Philippe Agostini. (5) Bernanos connaissait depuis 1938 la nouvelle La Dernière à /'Echafaud, dont le R.P. Brückberger lui avait passé un exemplaire de la première édition française , parue chez l'édi– teur parisien Desclé de Brouwer en 1930, c'est-à-dire une année avant la première édition allemande. (6) En abordant les Dialogues, Bernanos croyait les avoir finis en moins de deux mois: il les commençait fin octobe 1947 comptant les donner fin décembre. Il fut donc davantage passionné par l'œuvre qu'il ne le pensait primitivement. (7) La composition des Dialogues porte donc la marque de la même exigence qui a carac– térisé toutes les grandes créations romanesques. Les cahiers de travail révèlent la lente et labo– rieuse cristallisation de la pensée ; ce qui est important pour nous prouver que dans ces Dialogues il y a toute la personnalité de Bernanos et non seulement celle de la romancière allemande.

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