BASA
100 L. -A . Colliard la romancière allemande change, ce qui provoque un certain désarroi dans le public. Un éditeur allemand avait affirmé, en préface d'une traduction des Dialogues des Carmélites, que la pièce de Bernanos et la nouvelle avaient la même origine historique, ce qui revient à dire que Bernanos aurait écrit son livre sans avoir lu préalablement la nouvelle de Gertrude von Le Fort. Affirmation fausse, qui éveilla la méfiance de la romancière allemande, malgré tous les efforts d'Al– bert Béguin 13 • Chargé de faire l'adaptation de la nouvelle pour le cinéma, Ber– nanos était naturellement forcé de rendre cette adaptation ressem– blante . La dépendance de son œuvre n'est donc pas contestable, bien que l'autonomie des auteurs sur le plan spirituel demeure com– plète. La personnalité de Blanche de La Force, par exemple, reste bien l'œuvre primitivement et exclusivement de Gertrude von Le Fort, qui tout en s'inspirant d'un fait historique a su créer et donner à ce personnage sa propre vie psychologique 14 . Le manuscrit de Bernanos se compose d'une continuité de sé quences (pour le cinéma), sans divisions en actes. L'éditeur a tou– jours fait preuve d'un jugement très sûr et d'une parfaite discrétion dans son travail pour cette œuvre qui, tournée vers le cinéma, avait besoin, malgré le soin extrême apporté aux moindres détails, d'une mise au point pour une publication littéraire. Mais à vrai dire, il n'y eut pas de grands remaniements à faire ; il fallut seulement rédiger les scènes muettes et les indications de scène empruntées littéralement au scénario. Les Dialogues des Carmélites furent joués la première fois en 1951, à Zurich, en langue allemande, et l'année suivante à Paris, dans la version originelle française , au Théâtre Hébertot, dans l'adap- (13) L'indignation de Béguin égale celle de Gertrude von Le Fort: il proteste vivement auprès de l'éditeur contre cette déformation de la vérité, en déclarant que, «dès le début, nous avons tenu à mettre en évidence la part de création qui revient à l'auteur de la nou– velle». (14) Blanche est en effet inséparable de l'âme éplorée et abandonnée de la grande roman– cière allemande. G. von Le Fort = B. de La Force = B. de « La Faiblesse».
Made with FlippingBook
RkJQdWJsaXNoZXIy NzY4MjI=