BASA
XVI Académie Saint-Anselme Un grand défaut de certaines contrées françaises est d'appuyer trop sur les consonnes doubles : intel-ligent, som-met, son-net. De nos jours l' è ouvert tend à disparaître pour laisser la place à l' é fermé. Des mots terminés en ai et qui devraient se prononcer è écorchent nos oreilles. A la radio on entend prononcer Anglé, bonné, procé, foré, quai d'Orsé au lieu d'Anglais, bonnet, procès, forêt, quai d'Orsay ou Anglè, bonnè, etc.. Combien prononcent Migouel, Torquoemada, alors que les Espa– gnols même se contentent de dire Miguel, Torkemada. Plusieurs à la radio se plaisent à gâter le mot Joakim par celui de Yakim, insurrection pour inzurrection. Quelle est donc la conclusion ? Ou plutôt : quelle est la réponse à la question que se pose M. Fouché ? « Où prononce-t-on le mieux le fran– çais ? ». Il ne la donne pas. Pour la trouver, il n'y a qu'à chercher la con– trée qui n'est pas comprise parmi celles où la prononciations sont défec– tueuses et signalées par l'illustre professeur . Il y a en France une contrée enchanteresse, une province qui n'a jamais été occupée par l'étranger. C'est la Touraine. « Les habitants sont simples comme leur vie, dit Alfred de Vigny, ils sont doux comme l'air qu'ils respirent et forts comme le sol puissant qu'ils fertilisent. On ne voit sur leurs traits bruns ni la froide immobilité du Nord, ni la vivacité grimacière du Midi ; leur visage a, comme leur caractère, quelque chose de la candeur du vrai peuple de Saint Louis ; leurs cheveux châtains sont encore longs et arrondis autour des oreilles comme les statues de pierre de nos vieux rois ; leur langage est le plus pur .français, sans lenteur, ·sans vitesse, sans accent; le berceau de la langue française est là, près du ber– ceau de la monarchie». Dire qu'un idiome est sans accent c'est vouloir signifier du même coup qu'il n'a pas de défauts caractéristiques d'un ter– roir déterminé. Le meilleur centre du beau langage français est donc la Touraine. C'est merveille que d'entendre parler un Tourangéau, une Tou– rangelle. Après la Touraine, c'est Chambéry, Annecy, Grenoble, Thonon et quelque>:. autres petites localités de la Savoie, qui peuvent se vanter de parler un français qui n'écorche point les oreilles délicates. Plusieurs excel– lents écrivains français viennent de là. Ils se signalent par une pronon– ciation assez belle et correcte et aussi par leur acribologie et la pureté de leur langue ; tels un François de Sales, un Joseph de Maistre avec son frère Xavier, un Henri Bordeaux, un Costa de Beauregard, un Daniel-Rops, un Descôte, un Henri Menabrea, un André Tercinet, etc., qui tous se font lire par l'aisance de leurs phrases.
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