BASA

Xavier de Maistre et la V allée d'Aoste 241 Savoie n'était sans doute plus propice à inspirer, par le spectacle de ses monts et de ses lacs, ces élans du coeur, teintés de reli– giosité et ce panthéisme qui se souvient de la Profession de foi du Vicaire savoyard. Bien des années plus tard , en 1817 , le jeune Lamartine sera l'hôte des Maistre, au château de Bissy et, dan.s un ouvrage oublié écrit dans la dernière parti de sa vie, les Mémoires politiques, il décrit cette atmosphère familiale, qui avait peu changé depuis l'enfance de Xavier et qui nous restitue avec un:e grande puissance d'évocation l'ambiance dans laquelle se for– mera notre héros : « Cette société était adorable : une campagne arcadienne, au pied du mont du Chat une maisonnette, à demi cachée sous les noyers de Savoie; une fontaine jaillissante dans un bassin de bois , au milieu de la cour, la vue se perdant du côté du jardin dans l'ho– rizon bleu du lac du Bourget, à demi découvert à travers les châtai– gniers, et la vie suspendue aux branches; des prés en pente, des eaux courantes, une église de village couverte en chaume, à quelque distance ... » . Xavier de Maistre, ne montrera pas les marques précoces du génie intellectuel. Garçonnet paisible et rêveur, il reçoit des siens le sobriquet affectueux de « ban » , diminutif du français local « baban » qui signifie étourneau, gobe-mouches. Il est élevé à la campagne, par un bon prêtre quî l'éduque à la Jean-Jacques, rie lui imposant aucun plan précis d'études mais le laissant courir les champs et, surtout, dessiner et peindre les insectes et les fleurs. Xavier de Maistre sera peu intéressé par les spéculations mystiques , le prophétisme politique et l'ésotérisme un peu sombre dans lesquels son frère Joseph se plonge à corps perdu, à la suite des francs-ma– çons et des martinistes. Il demeure un homme du présent et du concret. Daniel-Rops , dans un essai sur !'écrivain, a bien mis en relief cette prédisposition de Xavier de Maistre à cette sorte de réalisme avant la lettre. « Le réalisme, écrit-il, l'esprit d'observation, l'honnêteté devant les choses de ce monde, sont assez caractéris– tiques du tempérament savoyard, pour qui le romantisme a toujours été quelque peu d'importation ». Scientifique et soucieux du détail exact, il le demeurera tout au long de sa carrière. En 1784, sur les traces de Montgolfier, il lance un ballon dans le ciel de Chambéry ; plus tard, il enverra aux sociétés savantes de Turin, de Genève et de Pétersbourg; des mémoires sur la chimie et la physiologie. En Russie, enfin, il se

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