BASA
Les rapports culturels entre la Savoie et le Val d'Aoste 323 ble de méthodes de pensée et d'agir qu'une somrp.e de connaissances ? N'y a-t-il qu'une culture des élites? Le peuple n'a-t-il pas aussi sa sagesse, c'est-à-dire sa méthode de comprendre, de juger, de s'ex– primer et d'agir ? Pourquoi donner un sens péjoratif à l'expression culture populaire? Le paysan valdôtain comme le paysan savoyard a été affronté depuis l'époque néolithique aux mêmes problèmes d'aménagement de la montagne. L'âge moderne en a découvert la splendeur, mais pen– dant des siècles la montagne a été pour ceux qui l'habitaient l'ad– versaire à dompter. Celle-ci offre les mêmes difficultés de part et d'autre des Alpes; elle a été profondément humanisée par les popu– lations alpestres. Les montagnards qui défrichent les pentes parfois fortes, qui élèvent des troupeaux, pensent; ils sont obligés de ré– fléchir pour pouvoir subsister. Là est née une sagesse qui s'est ex– primée par des proverbes, des coutumes, des chansons, des contes. N'est-ce pas une culture? En Val d'Aoste, l'excellente Revue du Comité des Traditions Valdôtaines Le Flambeau les recueille. En Savoie, des enquêtes déjà anciennes, dirigées par Van Gennep; n'ont pas complètement abouti. Il faudrait reprendre ce travail pour ar– river au résultat acquis en Val d 'Aoste. La comparaison des ré– sultats amènerait certainement à constater des liens profonds dans la culture populaire 15 . La culture est aussi une manière d'agir; dans l'extension de ce mot, il faut y ranger les méthodes d'exploitation du sol, les techniques agricoles, en particulier pastorales, et les formes des outils. Ne serait-ce pas une recherche intéressante de comparer les modes de mise en valeur du sol et les implantations humaines dans le Val d'Aoste et en Savoie? Sans faire des investigations pro– fondes, à première vue, les similitudes sont frappantes . Regardons l'aménagement en terrasses des pentes avec leurs innombrables murs de soutènement, la forme des champs, les villages groupés autour de leurs églises massives, les maisons trapues, les toits de lozes. Bien sûr, il y a des variantes, mais ne sont-elles pas les formes néces– saires des variétés de l'individualisme humain? La ressemblance est encore plus évidente dans les genres de vie de l'exploitation de la haute montagne; les techniques des alpages en Val d'Aoste et en Savoie ne diffèrent point. (15) ARNOLD VAN GENNEP, En Savoie. Du berceau à la tombe, Chambéry, Dardel, 1916, 328 pp.
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