BASA

142 ]. -C. Perrin Le passage de la classe servile à celle des vilains était possible grâce aux affranchissements, aux mariages avec une vilaine, à la substi– tution de la taille arbitraire par une autre fixe, propre du vilain libre 5 . Tous les sujets des seigneurs de Vallaise furent affranchis au cours du XIVe siècle 6 • Mais cette liberté ne signifie pas encore être possesseur de la terre : l'institution féod ale a détruit la propriété, car le roturier est seulement le tenancier du fief dont il a été investi par so:i seigneur. A cause de cette dépendance le seigneur a sur son sujet une infinité de droits qui, étant établis par la coutume, sont l'objet de fréquents abus et se multiplient au cours des siècles. Parmi les droits dus au feudataire nous notons le cens, la taille, la fidélité, le service, les décimes , plaits, laods et encore d'autres nombreux tributs en nature ou en argent 7 • La perception de ces droits, d'abord facile et claire, devint intolérable ensuite, car « des droits de provenance différente se sont croisés, amal– gamés, brouillés de telle sorte que l'enchevêtrement en demeurera peut– être à jamais inextricable » 8 . Au cours du XVIII 0 siècle on mit fin à cet état de choses en pour– voyant à l'extinction des cens. En Vallée d'Aoste ce fut l'oeuvre de la Royale Délégation qui, à part quelques cas précédents, affranchit, pendant la deuxième moitié du XVIIIe siècle et les premières années du XIXe, tous les droits féodaux dus par les particuliers et les communautés. Cependant cette action d'affranchissement a commencé plusieurs siècles avant. Depuis le XII" siècle nous assistons à la lutte, plus ou moins consciente, des paysans contre leurs seigneurs pour la conquête de libertés toujours plus amples. D'abord ce sont les chartes de fran– chises qui établissent les bans, les tailles, etc. que les seigneurs peuvent imposer. Voilà donc une première limitation aux pouvoirs des feudataires ! Puis ce sont des affranchissements particuliers de certains usages, services, rentes, cens; et enfin l'extinction de tout droit féodal. Quelle est la force qui poussa seigneurs et roturiers vers ces af– franchissements ? De la part des paysans il s'agit certainement de la volonté d'améliorer leur condition de vie politique, civile et économique. Quant à la deuxième partie contractante c'est, semble-t-il, la nécessité d'argent qui contraignit les feudataires à abdiquer à certains de leurs droits . Car pour obtenir (5) Cf. J. CALMETTE, op. cit., p. 112. (6) Nous avons repéré et transcrit sept franchises et statuts accordés par les Vallaise à leurs sujets. Ils forment l'ob jet de notre étude Franchises et Statuts des seigneurs de Vallaise qui attend d'être publiée. (7) Pour les droits seigneuriaux en Vallée d'Aoste, cf. D. NouSSAN, L'extinction des ccnses dans la Vallée d'Aoste, dans BASA, XIX, Aoste 1905, pp. 233-234 et passim; abbé HENRY, Reconnaissances et Inféodations dans la Valpelline (Seigneurie de Quart) en 1500. Imp. Catholique, Aoste 1938, note 9, pp. 62·63. (8) J. CALMETTE, op. cit., pp. 68-69.

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