BASA

T émoignages et documents 243 lui proposant des mesures de sûreté publique, qui n'ont pas été adoptées » 66 . Cette interprétation est appuyée par le témoignage de !'archiprêtre Frutaz: « Au milieu de ces détresses et dans la grande penurie des danrées et de leur cherté, outre les agioteurs et monopoleurs que la liberté rendait impunis, le cerveaux du peuple s'échauffa à un point qu'il imagina que par l'aneantissement des jacobins son sort pourrait se meliorer. Sourde– ment il hourdit une conjuration contre cette race d'hommes qui ne tendaient vraiment qu'au despotisme et à l'impieté. Deja faché de voir remplacer les croix que l'on avoit substitué aux arbres de liberté de nouveau enlevées et profanées, fatigué des impots dont avec sa misere il se voyait surchargé, appuyé d'ailleurs par les mecontentements que le peuple du Piemont et surtout de cellui qui avoisine le bas Val d'Aoste, temoignoit depuis longtemps, il se lia d'intelligence avec lui pour s'assurer de leur disposition, ce qui ne put s'executer que vers la fin de l'année 1800 » 67 • L'accusation contre les émigrés est acceptée par Fenoil. En soulignant que de 1792 à 1802 il y eut en Vallée d'Aoste près de 100 ecclésiastiques réfugiés plus autant de nobles, celui-ci ajoute: « Sans aucun doute il y avait là un ferment d'agitation. Il en est qui se complaisaient à voir dans ces émigrés autant de martyrs de la religion et de la justice. Mais la vérité est que la Révolution française n'avait pas jeté par dessus les montagnes que des perles. De l'écume s'y trouvait » 68 • Cependant, l'abbé Fenoil trouvait moins fondée l'accusation contre les curés valdôtains. Evidemment la surcharge d'impôts eut son poids dans l'origine de l'émeute populaire . Les divers attentats contre la religion étaient égale– ment mal vus et troublèrent un peuple foncièrement attaché à la foi catholique. Parmi les causes de l'insurrection l'abbé Fenoil compte aussi la part de Bruni « homme énergique, adroit, perspicace, mais violent et même impie, s'il faut en croire aux divers témoins de l'époque ». Bruni ne connaissait probablement pas « le terrain sur lequel il marchait, où s'il le connaissait, il n'hésita pas à engager la bataille, sûr de l'emporter par l'audace» . Au contraire, par ses mesures trop rigides , il « ne fit chez nous que charger la mine au profit des royalistes qu'il détestait et qu'avec un peu plus de sagesse il aurait pu facilement isoler» 69 . Guillaume Cerise, dans sa correspondance avec Laurent Martinet, qui sera nommé commissaire d'Aoste à la suite de la destitution de Bruni, ne ménage point les critiques contre celui-ci qui aurait, selon lui, accumulé beaucoup d'erreurs: «Ce que tu m'as dit de B ... ne m'attriste point, il me fait pitié, je serais faché d'avoir l'éstime de pareils êtres, (66) BRUNI, op. cil. , pp. 4-5. ( 67) Cf. supra, p. 208. (68) F. FENOIL, op. cil., p . 221. (69) Ibidem, pp. 225-29.

RkJQdWJsaXNoZXIy NzY4MjI=