BASA

262 A. Zanotto capitaine Decoularé, commandant le parc d'artillerie française, pour contenir les insurgés à quelques lieues d'ici par ses représentations pastorales, l'adju– tant commandant Merk jugea qu'il était prudent de faire reformer la munici– palité. Cette mesure est peut-être l'effet des nouvelles reçues de la part des envoyés. On espérait tout de la médiation [fol. 24r] du citoyen évêque et du capitaine Decoularé. (Il est à noter que les citoyens évêque et commnndant De– coularé dans leur rencontre nvec la colonne rebelle avaient déjà réussi à la capaciter et faire rétrograder de quelques pas, lorsque, rencontrant icelle une masse d'habitans du haut Canavais, qui venait s'y joindre, elle fut de nouveau réexaltée par ces derniers et obligée de rétrograder pour poursuivre sa botte). La nouvelle municipalité se déclara en séance permanente. Elle prit toutes les mesures possibles; et déjà l'on se croyait préservés du péril, mais quelle fut sa frayeur lorsque des éclaireurs placés çà et là vinrent l'avertir subitement que malgré tous les efforts et l'éloquence des médiateurs, cette force armée était bientôt aux portes ! Alors , voyant que dans une petite ville sans armes et abandonnée à elle– même il n'y avait plus d'autres ressources que les voies de douceur concertées avec le citoyen Merk, elle rassembla à la hâte le clergé et tous les notables de la ville. Le parti fut pris: tous allèrent au devant à la distance d'un quart d'heure sur la route du Piémont, où ils furent arrêtés par l'avant-garde. Enfin le corps armé étant en présence, le citoyen commandant le pérora, la munici– palité fit tous ses efforts, le clergé les remontra: mais tout fut inutile pour les faire rétrograder. Tant leur fureur était à son comble. Ils entrèrent donc dans la ville un peu avant la nuit, sans aucun chef, du moins connu; et déjà l'air ne rétentissait plus que des cris: «Vive la Répu– blique, Vive la Nation française. [fol. 24v] Paix aux honnêtes gens. Mort aux jacobins». La municipalité fut alors obligée de les loger du mieux qu'elle put: la ville fut éclairée toute la nuit pour éviter de plus grands désordres. Cependant, malgré toute la vigilance possible, les intentions du pillage commençant un peu à se manifester, chaque citoyen se tint sur ses gardes. Le lendemain 23 nivôse [13 janv.] fut un jour d'horreur. A la vérité, grâces aux soins des corps et de tous les honnetes citoyens, il n'y a point eu du sang répandu. D'ailleurs à l'exception d'un seul qui fut arrêté et qui a été sauvé d'entre leurs mains au moment de la mort, tous les autres individus que cette masse poursuivait avaient eu le temps de s'évader. Mais le pillage s'est fait dans un grand nombre de maisons avec rage. Le citoyen évêque, tout le clergé, toute la municipalité tant unîtement que séparément, se portèrent dans tous les endroits pour les contenir, mais inuti– lement. Enfin, à une heure après midi, ne connaissant plus aucun autre remède au mal, on crut devoir faire une procession solemnelle. Cette mesure ne fut pas sans effet: quelques communes [fol. 25'] commencèrent à partir. Les autres continuaient encore. Mais enfin, sur une nouvelle sommation du citoyen général et un nouvel ordre répété dans tous les carrefours par la municipalité, on commença à respirer. Ils se retirèrent cependant avec menace de revenir au premier jour qu'ils apprendraient le retour des jacobins. Comme plusieurs d'entr'eux étaient restés ensevelis dans le vin , la nuit ne fut pas sans crainte. C'est pourquoi, afin de prévenir la continuation du

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