BASA

Les Valdôtains, les Suisses et les tunnels alpins 291 La réponse ne peut être douteuse. Le gouvernement italien doit donner aussi sa préférence au Mont-Blanc et se concerter avec le gouvernement français, que l'on affirme très-bien disposé pour cela ... Que tous les grands et petits centres industriels et commerciaux du nord de l'Italie agissent, de tout leur pouvoir, sur l'opinion publique en faveur du Mont-Blanc, car si jamais l'I talie et la France venaient à subventionner le Simplon, tout le commerce des grandes villes de l'ancien Piémont serait paralysé pendant bien longtemps , des siècles peut-être ... » 18 Ce n'est pas l'avis de tout le monde, et notamment d 'un Genevois éminent , le savant physicien Jean-Daniel Colladon qui, contre toute attente, et seul de son opinion parmi tous les Genevois préoccupés du franchissement des Alpes, va se déclarer l'adversaire résolu du percement du Mont-Blanc. D 'une famille originaire du Berry en France, réfugiée à Genève au XVIe siècle, né dans cette ville en 1802, mort en 1893, docteur en droit, ingénieur, il professe la mécanique à !'Ecole centrale des arts et manu– factures de Paris de 1829 à 1839, se livre à des études sur la compression des liquides et sur la vitesse du son dans l'eau (ce qui lui vaut à l'âge de vingt-cinq ans le Grand Prix de l'Académie des Sciences de Paris), pro– cède à des recherches concernant l'électricité, la foudre et les paratonnerres, l'éclairage au gaz, la propulsion des bateaux à vapeur. Il se fait connaître surtout par ses travaux sur l'utilisation de l'air comprimé comme moyen de transmission de l'énergie et de mise en action des fleurets pour le percement des roches; invention qui va révolutionner l'art de creuser des tunnels et permettre le percement du Fréjus et celui du Saint-Gothard. Ses nombreuses découvertes lui vaudront d'enviables distinctions, tel– les que membre correspondant de l'Institut de France, commandeur de l'Ordre des SS . Maurice et Lazare, officier de la Légion d'honneur. Dans une première brochure 19 , Colladon prend violemment à partie le chanoine Bérard et le professeur Baretti: « Ceux qui s'imaginent qu'ils ont découvert dans un tracé par les vallées de l'Arve et de la Doire une grande ligne qui rivalisera avanta– geusement avec le chemin de fer du Gothard et que surexciten t cette pré– tendue découverte et l'honneur de passer sous le géant des Alpes ont été tellement séduits ou aveuglés par des considérations secondaires et par le désir de satisfaire quelques intérêts locaux, qu'ils sont arrivés à mécon– naître des faits authentiques , des vérités géométriques incontestables et à présenter dès l'origine, comme bases de leurs projets, des distances très inexactes, puisqu'elles ne sont pas majorées pour les fortes pentes, et des projets d'exécution qui conduiraient inévitablement à d'énormes déboires (18) Op. cit., pp. 24-25. (19) CoLLADON, D., Notes sur les inconvénients et les difficultés du tunnel étudié sous le Mont-Blanc et de ses lignes d'accès proietées - A vantages incontestables d'un chemin de fer international par le Simplon, Genève 1880.

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