BASA
L'ouvrage du Père André Vachon, S. ]., Le T emps et l'Es pace dans !'œuvre de Pau! Claudel 1 , publié sous les auspices du Conseil canadien de Recherche sur les Humanités, es t venu exactement à son heure. En 1929, Paul Claudel avait écrit dans son Journal: « Quand je serai mort, on m'élèvera des monuments et on payera des « professeurs pour me commenter. Alors les critiques feront des livres « sur moi, alors que de mon vivant, pas plus que les autres grands «poètes qui m'ont précédé, je n'ai reçu d'eux un verre d'eau. Au fond , «c'est bien et cela m'a permis de faire mon œuvre sous le regard de « Dieu, en esprit de solitude et de chasteté 2 ». L'année 1965 fut précisement celle du dixième anniversaire de la mort du grand écrivain catholique français 3 : il nous a paru bon d'ar– rêter à cette date - avant de rendre compte plus en détail de l'ouvrage d'André Vachon - une sorte de bilan (non exhaustif) des études sur Paul Claudel, et d'examiner si l'auteur des Cinq grandes odes a bien été, pour ce qui le concernait , l'infaillible prophète que voyait en lui, sur le plan diplomatique, son ami de toujours et son protecteur au Quai d 'Orsay, Philippe Berthelot 4 • Constatons d 'abord que, malgré certaines réserves 5 de Mauriac 6 et de Bernanos 7, !'oeuvre claudélienne a désormais une large audience ; (1) André Vachon, Le Temps et /'Espace dans l'œuvre de Paul Claudel. Expérience chrétienne et imagination poétique. Edi t. du Seuil, Collection «Pierres vives», Paris, 1965, pp. 456. (2) Cité par le Père F. Varillon dans son article sur La vie spirituelle de Paul Claudel d'après son Journal inédit , publié dans la revue catholique Etudes, n. de février 1965. (3 ) On sai t que le poète, né le 6 août 1863, s'c:;t tt~int à Paris le 23 février 1955 et qu'il a eu l'honneur d'obsèques nationales le 28 février à Notre-Dame de Paris. (4) Leur amitié, qui datait de leur sé jour en Chine (1902), ne s'éteignit qu'à la mort du Directeur Général du Ministère des Affaires Etrangères (1934 ), notoirement agnostique en matière de religion. (5 ) Cf. B. Matteucci, Ricardo di Paul Claudel, in Humanitas, n. 6 (1956), où tout en reconnaissant les mérites de ce « témoin de la vérité chrétienne» le critique italien envisage, sans indulgence, les principales « contradictions » clc,udéliennes entre ca– tholicisme et foi solitaire, entre inspiration mystique et images charnelles, entre langage polémique et message évangélique. (6) « Claudel n'était pas une âme naturellement chrétienne» (cf. l'article de François Mauriac paru dans le «Figaro Littéraire» du 24-9-1955). (7 ) Pour Bernanos, qui dénonce l'impossible alliance de la poésie et de la richesse, Paul Claudel, « fonctionnaire et paroissien, galonné des pieds à la tête», symbolise le catholicisme officiel , voire mondain, avec toutes les comprom issions que cette situation pourrait comporter. Cf. Henri Giordan, Bernanos et Claudel, in Rivista di Letterature Moderne e Comparate, n. 3, (1962), Firenze.
Made with FlippingBook
RkJQdWJsaXNoZXIy NzY4MjI=