BASA
16 P. Vignaux désintéressait-elle des raisonnements théologiques, même présentés et reconnus spécifiquement tels? Au point de vue où nous sommes placés, la question du caractère théologique des ouvrages d'Anselme peut donc être - pour le moment - négligée; il suffit que ces oeuvres proposent des « raisons nécessaires ». Dans la situation pré– sente où l'intérêt pour les logiques médiévales accompagne le déve– loppement contemporain des logiques modernes, il est normal que l'on cherche à formaliser davantage l'argumentation pour en rendre manifeste la nécessité. Cette formalisation pose cependant plusieurs problèmes. Lorsqu'elle conduit à multiplier les propositions explicatives d'un argument que l'auteur a voulu unique, à lui seul capable de se prouver, - ... unum argumentum, quod nullo alio ad se probandum quam se solo indigeret.. . -, comme dans une analyse récente des chapitres II et III du Proslogion, 6 on demandera dans quelle mesure une explicitation aussi complexe permet de décrire la structure et de mieux saisir la valeur du raisonnement donné, il faudrait également demander si cette explicitation est historiquement fondée dans les réponses d'Anselme à son critique Gaunilon. Autres problèmes: ceux posés par la traduction de la dialectique anselmienne dans une des «langues symboliques» de notre époque. Première question : comment est justifié le choix de l'une d'elles et non d'une autre? Celui par M. Desmond Paul Henry du système formel de Lesniewski dit « ontologie » ou celui, différent, qu'a fait M. Jules Vuillemin. 7 Seconde question, plus générale, radicale: cette traduction dans un langage ultérieur ne trahit-elle pas l'origi– nalité de l'expression dialectique d'un auteur du XIe siècle? Cette traduction est en effet une entreprise différente de celle qui consisterait à rapporter les arguments d'Anselme aux écrits logiques antérieurs qu'il peut avoir connus, selon lesquels il a pu être formé. Faut-il rappeler que la démonstration « d'une façon géométri– que » des vérités fondamentales de la philosophie première dans les secondes Réponses ne permet nullement de saisir l'essence des Mé- • Richard R. LA CROIX, Proslogion II and III, A third .interpretation of Anselm's Argument, Brill, Leiden, 1972. 7 Jules VurLLEMIN, Le Dieu d'Anselme et les apparences de la raison, Aubier, Paris, 1971.
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