BASA

Interprétation du «Proslogion» 73 ici critiquée est saisie dans sa nature propre ou si elle est soumise à une réduction. L'auteur la voit comme issue des mathématiques anciennes et comme anticipant les mathématiques modernes: «En s'appliquant hors des mathématiques, écrit-il, le réalisme philosophique avait engendré comme son produit naturel la théologie rationnelle » (p. 138). Ainsi, selon Vuillemin, le type de rationalité engagé dans la preuve d'Anselme est de même nature que celui qu'on observe dans la théorie des ensembles et la logique des classes; elle relève des mêmes présupposés ontologiques, ceux qu'on trouve, par exem– ple, dans la première philosophie de Russell; elle pose les mêmes problèmes. Attaché à un certain type de rationalité contemporain, l'auteur, mesurant la pensée d'Anselme à cette aune, ne peut manquer de lui être défavorable. 2) L'auteur ne projette-t-il pas sur le Proslogion le langage d'autres philosophies? Cette projection est sans conséquence, bien qu'elle étonne, quand, énonçant une condition de validité de la preuve d'Anselme, l'auteur écrit: «Puisque la réalité objective de l'idée de Dieu, étant infinie, ne peut être causée par le Moi, que, par conséquent, elle possède une valeur objective en ce qu'elle représente hors d'elle-même (en notre esprit) la réalité formelle de la chose, et que c'est un cas unique parmi les êtres, etc. » (p. 37). Mais la problématique cartésienne ne se substitue-t-elle pas à celle d'Anselme qui, lui, ne raisonne pas par la causalité? Quoique Vuillemin distingue heureusement le problème kantien du passage de l'essence à l'existence et la position anselmienne, il ne laisse pas de maintenir un langage leibnizo-kantien en parlant du possible et de l'existence: in intellectu désignerait l'ordre de la possibilité ou de l'essence, et in re celui de la réalité. Pour Anselme, cependant, in intellectu et in re entretiennent le même rapport que la ressemblance de l'essence et l'essence. On lit en effet dans le Monologion, ch . 36, que « les sub– stances créées sont très différentes en elles-mêmes de ce qu'elles sont dans notre science. En elles-mêmes, elles sont par leur essence, mais dans notre science, elles ne sont pas par leur essence, mais seulement par leur ressemblance ». Certes, il s'agit ici de la présence dans notre science des choses créées et non de Dieu, mais ce texte est révélateur, car il nous apprend que notre intellect est habité

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