BASA
Interprétation du «Proslogiom 81 Il ne suffit pas de dire que la logique travaille ici sur des prémisses qu'elle ne fournit pas ou que l'argument est hypothético– déductif. Il faut peut-être ajouter que la pensée d'Anselme se ramène à une intuition rationnelle qui continue à agir au niveau de la déduction. Un peu comme dans le «je pense, donc je suis », le fondement du « je pense » est perçu intuitivement et par là démons– trativement dans le « je suis », dans le « je pense Dieu, donc il est impossible que Dieu ne soit pas », Dieu est perçu intuitivement et démonstrativement comme le fondement de sa pensée en moi: avec l'idée de la réalité suprême, quelque chose d'elle est déjà posé qui requiert une plénitude fondatrice. Si le concept de Dieu implique que ni dans son existence ni dans son essence Dieu ne dépend d'autre chose, on ne voit pas comment une preuve de Dieu, au sens strict, puisse être fournie. C'est par lui au contraire que tout est prouvé. On ne démontre pas ce qui est premier; on prend conscience de son idée, de sa nécessité, de ses implications. Cependant il ne s'agit pas ici d'une simple méditation sur Dieu, puisqu'une structure de raisonnement subsiste. Mais celui-ci n'a de sens que si l'on s'ouvre à l'idée qui en est l'objet. Ce lien entre l'intuition et la démonstration a été exprimé à plusieurs reprises dans l'histoire. Plotin, par exemple, a dit que les démonstrations qu'on donne de Dieu sont aussi des moyens de s'élever jusqu'à lui, 7 et Hegel, que les preuves de Dieu ne sont autre chose qu'une description de l'élévation vers lui. 8 Dira-t-on que cela est contraire à l'intention d'Anselme qui a cru apporter un véritable « argument » destiné à prouver l'existence de Dieu? Mais ce même Anselme a écrit, à la fin du chapitre 1 du Proslogion: «Je ne tente pas, Seigneur, de pénétrer ta hauteur, car je ne compare nullement mon intelligence à elle, mais je désire comprendre dans une certaine mesure ta vérité que croit et aime mon coeur ». 8) La logique formelle n'a-t-elle pas des limites? On sait que la formalisation n'est pas neutre: les règles qu'elle utilise pour ' Enn., 1, 3, 1. 8 Phil. de la Relig., Jère partie, ch. 2. 2, 3.
Made with FlippingBook
RkJQdWJsaXNoZXIy NzY4MjI=