BASA

82 F . Brunner formaliser sont toujours définies à l'intérieur d'un système parmi d'autres possibles. Si la preuve anselmienne n'est pas valide dans le formalisme russellien, suit-il qu'elle ne le soit pas dans un autre système? Elle peut aussi appartenir à un type de démarche qui ne relève pas de la pensée conceptuelle au sens étroit. Soumises à des règles formelles, les preuves ne peuvent nous donner rien d'autre que du formel; elles ne nous fournissent aucun savoir. Et la condition de la logique étant l'univocité, on ne voit pas comment elle peut atteindre Dieu qui dépasse tout ce qu'on connaît et pense ici-bas. Ayant admis que la preuve véritable ne sort pas d'une chaîne de ressemblance, Vuillemin élimine l'usage de l'analogie et de l'équivocité, qui est pourtant indispensable ici . D'ailleurs, la ressemblance elle-même, la logique l'ignore ou la réduit à l'identité. La ressemblance, qui échappe à l'univocité, n'a jamais été formalisée, ni la qualité. Elles font intervenir toutes deux des facteurs métalogiques. Et comment la logique prouvera+ elle, je ne dis pas l'existence de Dieu, mais une existence quelconque, celle du monde extérieur, par exemple, celle de chacun de nous? Sait-elle qu'il y a de l'être? Ni la logique de Russell ni aucune autre ne nous permet de passer d'une définition à l'existence. Aucun système de logique n'est capable de dire quelque chose sur les contenus. Dans l'argument d'Anselme, «grand» ne peut être précisé n'importe comment; il ne s'agit pas, par exemple, du nombre des côtés d'un polygone tendant vers le cercle . Si donc la question de la grandeur de Dieu se pose d'abord au niveau du contenu, il est inutile de s'adresser à la logique pour la trancher. Il est certain cependant que l'effort de Vuillemin aboutit à plusieurs reprises à éclairer l'argumentation d'Anselme, et on ne saurait trop insister sur la patience et la lucidité dont l'auteur fait preuve. Encore une fois, les mérites de son ouvrage sont majeurs et les questions qu'il approfondit sont d'un intérêt et d'une importance exceptionnels. Mais il demeure vrai que la formalisation a ses limites et qu'un grand nombre de propositions échappent aux lois de la logique formelle. Il y a des choses qu'on dit non logiques

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