BASA

L'argument d'Anselme 147 astruere.. .), 24 Gaunilon n'affirme pas moins nettement son rejet de l'argument (istud nondum credo) 25 et ce qu'il reproche à l'argu– mentateur c'est précisément un manque de pédagogie; il lui reproche de ne pas faire suffisemment attention à celui qu'il veut convaincre non satis attendit cui loquatur. 26 Au fond, on voit bien que la difficulté pour l'argumentateur était autant pédagogique que théori– que: comment expliquer l'acte de compréhension à celui qui · com– prend mal, qui le comprendra mal donc? Par des exemples? Il va dévier leur sens. Par une exhortation? Ce serait vivre une bien courte définition de la parole, de l'école et de la foi. Au début de sa contre-objection à Gaunilon, Anselme dit: quod intellectu intelligitur, sicut intelligitur sic est in intellectu. 27 Cela voudrait-il dire que le mode de compréhension influerait sur l'intelligence (i.e. sur la vision) 28 de l'image: une bonne com– préhension pourrait-elle, à la limite, offrir l' « entre-vue » 29 de l'image divine et ainsi acculer l'âme à reconnaître qu'elle croyait? Anselme ne termine-t-il pas en disant que « celui qui nie qu'il y a quelque chose dont on ne peut concevoir de plus grand comprend et pense la négation qu'il fait ». 30 Autrement dit, l'insensé ne comprend pas que sa négation n'est possible que parce qu'il a en lui l'image divine grâce à laquelle il peut composer son argumen– tation. Plus il la nie habilement, plus il montre qu'il comprend cette image et ainsi s'en approche. C'était cela qu'il fallait lui faire comprendre: c'était cela l'argument. Quid hoc planius? Mais com– ment l'élève qui ne comprend pas pourrait-il faire le partage entre ce qui se rapporte à ce qui est dit et ce qui se rapporte à la façon 2 • Cf. K-64. 25 Cf. K-58 . 26 Cf. K-62. Koyré traduit ainsi: « celui( ...)ne fait pas suffisamment attention à (la pensée de celui) à qui il parle» (K-63). 21 Cf. K-76. 28 Le même verbe (intelligere) exprime, dans le texte d'Anselme, l'acte de comprendre et l'acte d'entrevoir (i.e. visionner): «Non tento, Domine, penetrare altitudinem tuam, quia nullatenus comparo illi intellectum meum; sed desidero aliquatenus intelligere veritatem tuam » (K-10). Consulter sur ce point GILSON (E.), op. cit., pp. 29 et 50. 29 C'est tout le contenu du chapitre XVI; cf. K-34 et 36. 30 « Quisquis igitur negat, aliquid esse quo majus nequeat cogitari, utique intelligit et cogitai negationem quam facit » (K-94). C'est moi qui souligne.

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