BASA
Saint Anselme liturgiste 285 Je le tire d'un Livre d'Heures, et le texte est en vieux français du XVe siècle: il n'en a que plus de saveur: Sires très douz, ie t'aimme, mas petit et tièdement; clone-moi que ie t'amoie plux et plux ardamment. 0 li plus beaus de toutes choses! 0 plus amereus de toutes créatures, clone moi que ie te désirroie tant corn ie vueil et tant corn ie doi; bons es tu sanz mesure et, por ce, sanz mesure doiz estre amez, espécialment de nous que as amei si ardamment, que as sauvei si merveilleusement, pour les quelx tu as fait de choses et si granz et si beles, pour les quelz tu as fait le ciel et la terre et la mer et toutes les choses qui i sunt, es quelx tu as appereillie es les délices clou ciel que sunt orendroit abscondutes à toute créature mortel. Mais tout cela, Mesdames, Messieurs , n'est que l'expression de la pensée privée, et donc non-liturgique, et cela ne nous renseigne donc pas sur l'objet même de cette communication , à savoir saint Anselme liturgiste. Or, il se trouve qu'étant archevêque de Can– torbéry, Anselme fut sollicité de répondre aux questions proprement liturgiques que lui posait un bénédictin allemand, devenu évêque de Naumbourg, et qui professait pour lui un véritable culte. Mon collègue, M. le Professeur Frohlich, vous parlera de lui tout à l'heure: il s'agit de Walram de Schwarzenberg, qui mourut en 1111, deux ans après Anselme. C'était l'époque du schisme infiniment regrettable entre l'Eglise d'Occident et l'Eglise d'Orient (1054) , et l'un des points de litige, entre les deux Eglises-soeurs, était la matière de !'Eucharistie: fallait-il employer du pain azyme , comme le faisaient les Latins, ou au contraire du pain fermenté, comme le pratiquaient les Grecs? Walram, désireux de s'instruire, écrivit à Anselme une lettre aujourd'hui perdue, dans laquelle il lui exposait ses doutes et ses scrupules à ce sujet, et lui demandait en même temps des explications. Nous possédons encore heureusement la réponse d'Anselme, et, en la lisant, on peut constater avec surprise que ce valdôtain s'y montre plus normand que les Normands! Il répond en effet que, d'une part, on ignore complètement lequel des deux genres de pain le Christ a utilisé à la Cène, et, d'autre part, que le pain soit azyme ou fermenté n'a aucune importance, vu que c'est toujours du pain, et que la question de son ami est donc une question... byzantine! C'est l'Epistola Anselmi de sacrificio azymi et fermentati, dont
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