BASA

LIV Lin Colliard gieux du devoir, qui était bien l'apanage de la classe dirigeante val– dôtaine du temps jadis: une rigueur civique qui enfonçait peut-être ses racines dans le rigorisme moral de nos ancêtres. Rien ne lui était plus étranger que le laxisme d'aujourd'hui, l'abdication des valeurs et du bon sens, le relativisme moral, le com– promis révoltant et cynique, le « laisser-aller » du « décadentisme » contemporain et le « borbonisme » impérant dans l'administration publique. Un personnage d'autrefois, dans le meilleur sens du mot: tel était M. Pignet, un des derniers représentants de la sévère tradition de la bureaucratie subalpine. Cette fermeté des principes s'alliait en lui à un réalisme pro– fond: d'où son ironie subtile, mais souriante, et son scepticisme à peine voilé. D'une simplicité absolue, d'une courtoisie extrême, mais sobre et réservée quant à la forme, d'une générosité sans bornes, M. Pignet a rendu d'immenses services à une véritable phalange de savants et d'étudiants universitaires de toute nationalité, mais surtout val– dôtains. Nous lui en savons profondément gré. Valdôtain M. Pignet l'était jusqu'à l'entêtement. Son éloigne– ment du Val d'Aoste avait accentué dans ce «sentimental» que l'on prétendait à tort froid et impassible, l'amour inconditionné de sa terre natale, de ces « charmants vallons d'où le parfum s'exhale » (Gérard). Mais son amour du Pays, bien que profond et viscéral même, demeurait réfractaire à cet « esprit de clocher » excessif, à ce chauvi– nisme criard et stérile, sentant le bluff, qui n'a certes pas rendu un bon service à la Cause valdôtaine. Peu de personnes - croyons-nous - ont souffert autant que M. Pignet de son « exil », plus ou moins volontaire, de sa chère Vallée d'Aoste. Enfermé la plus grande partie de l'année dans les salles im– menses, aux parois combles d'in-folio dorés de la Bibliothèque Royale, dans la brume épaisse de l'hiver turinois, notre ami n'avait qu'un rêve: rejoindre au plus tôt son ancienne ferme-villa de la

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