Bibliotheque de l Archivum Augustanim - 01/05/1985

Etudes d'Histoire .Valdôtaine 135 Sous l'impulsion surtout de Louis Gorret, prévôt de la Cathé– drale et chef reconnu de l'intransigeance catholique, ce groupe de prêtres (et avec eux le cercle de jeunes lévites du Grand Séminaire, mieux connus sous le nom de «Jacquemistes») fut exposé, aux premiers temps de l'épiscopat de Mgr Tasso (1908-1919), à l'accusa– tion plus ou moins explicite de «modernisme». En fait, ni Trèves ni ses amis n'ont jamais été des modernistes. Ici encore on aimait confondre l'action sociale et politique avec un phénomène d'une portée religieuse bien plus vaste. Cela, bien sûr, n 'exclut pas la présence de certains prodromes modernistes en Vallée d'Aoste : l'hebdomadaire du docteur Anselme Réan, fe Progrès , paru en 1906, nous le témoigne. Mais, chez nous, ce mouvement novateur n'a pas eu de suite. Les relations que Piero Giacosa entretint avec Réan et le chanoine Frutaz, l'amitié que lia Antonio Fogazzaro à l'abbé Jean-Jacques Christillin, l'incomparable auteur des Légendes de fa Vallée du Lys, l'engouement que, paraît-il, le chanoine Marcel Christillin 25 et d'autres rares ecclésiastiques ont eu, un moment, pour le moder– nisme, sont des événements qui ne sortent pas de la sphère des faits personnels. Chez Trèves, pas la moindre trace de modernisme théologique. Il est aussi très éloigné du catholicisme libéral; sa critique des «préjugés» libéraux répercute les motifs de l'intégrisme catholique le plus pur. Son opposition au socialisme est nette, tranchante 26 • En dépit de tout cela, l'ouverture sociale de ce «populiste» catholique, à la fois intégriste et progressiste, demeure indéniable. Sa conception de l'histoire est, nous le répétons, d'une modernité et d'une actualité qui nous surprennent. Il reste à voir si et dans quelle mesure la leçon efficace et clairvoyante de l'abbé Trèves a été recueillie par les historiens valdôtains de nos jours. " Cf. Lettres inédites de Mg r J.-A. Duc au chanoine D. Noussan (1909-1915 ) , Aoste - Archives privées. 26 Ecrits, cit. , p. 121.