Bibliotheque de l Archivum Augustanim - 01/05/1985

Etudes d'Histoire Valdôtaine 253 constitutionnel à la Grégoire. D'aucuns ont même prétendu le comparer (si parva licet... ) à un néo-illuministe tel que Lambruschini! En réalité, tous ces éléments sont en germe en lui: mais il ne s'arrête pas là; il élabore sans relâche les données de sa culture hétéroclite, pour passer des vieilles synthèses à de nouvelles thèses, prédisposant incessamment des programmes, toujours fidèle à sa conception plus que romantique du Progrès. Orsières n'est pas un logicien , c'est plutôt un poète. Dans ses ouvrages, il se laisse volon– tiers emporter par l'enthousiasme, il procède par illuminations suc– cessives ; bref, c'est un homme de coeur plus que de raison . Jeune étudiant, il avait pris part à l'émeute populaire de mars 1821 , mar– chant à la tête d'un cortège de jeunes gens qui se dirigeait sur le palais Roncas, siège de l'Intendant du Duché. Ce fut là son baptême révolutionnaire. Prêtre et chanoine de la Cathédrale, il se singularisa bientôt, même comme ecclésiastique. On a voulu rattacher son Gallicanisme à la fréquentation des cours de droit à l'Université de Turin, mais n'oublions pas que le milieu ecclésiastique valdôtain de la première moitié du XIX• siècle, était lui-même passablement imprégné d'idées gallicanes. Certes, l'Université forgea son âme d'une façon définitive, le liant à la cause de la liberté politique, qui demeure l'une des com– posantes essentielles du «Risorgimento». Le moment historique était décisif et Orsières le devinait bien . Sans cela, il aurait peut-être passé sa vie en véritable épicurien, partageant les loisirs que lui laissaient l'office du choeur et l'ensei– gnement au Collège \ entre les recherches historiques, la poésie et les voyages. Les voyages furent , en effet, la grande passion de ce cos– mopolite valdôtain : Rome, Paris, Londres, ont été successivement les étapes de cet esprit observateur. Qu'on lise ses Observations ethno– logiques, on pourrait le prendre à cet égard pour un Alfieri ou un Baretti ressuscités. Ici son anglomanie est très évidente : les formes institutionnelles et le progrès scientifique des Anglais l'exaltent. A la suite des événements de 1848, auxquels naturellement il prit 2 Le Collège Sr-Bénin fondé en 1597.