Bibliotheque de l Archivum Augustanim - 01/05/1985
Etudes d'Histoire Valdôtaine 257 intéressant, n'est pas tel à appeler une attention spéciale, si l'on excepte son adhésion au projet de la loi Siccardi sur l'«incamera– mento» des biens ecclésiastiques. La grandeur d'Orsières réside en– tièrement dans son idéologie et dans son programme réformistes: réforme ecclésiale, réformes civiles. Orsières est grand comme pro– pulseur et propagateur de nouveaux intérêts, comme semeur d'idées, comme apôtre de civilisation. Le petit Gioberti valdôtain, comme l'appelaient ironiquement ses adversaires, a soulevé en Vallée d'Aoste une quantité extraordinaire de problèmes d'intérêt civil, les mêmes qui troublaient alors les consciences en Italie et ailleurs. Journaliste intrépide, écrivain d'allure classique, Orsières remplit les colonnes de la Feuille d'Annonces et du Constitutionnel valdôtain de tout ce que l'Europe savante débattait en ce temps-là. Progressiste convaincu, il se souciait grandement de voir appliquer dans son Pays ces amélio– rations d'ordre moral, intellectuel et matériel qu'il envisageait avec tant de passion. Et d'abord le problème pédagogique. Lisons l'Essai sur l'éducation (1853), l'Esquisse sur l'instruction des femmes (1854), l'Essai sur les progrès (1864). Il y a là de belles pages d'un intérêt toujours actuel, de géniales intuitions sur l'émancipation de la fem– me, sur l'hygiène et l'éducation des enfants, le souvenir de Locke et de Rousseau est toujours présent. Dans chacun de ses ouvrages transparaît son engouement pour la morale kantienne. Il fustige l'éducation des jeunes basée sur l'hypocrisie et la crainte, la concep– tion de la religion comme instrument politique, «le bigotisme hai– neux et vindicatif des faux dévots». Il prône la liberté de conscience: «Dieu veut que chacun soit libre de croire ou de ne pas croire. La liberté de conscience est un droit de l'homme». Sa critique des formes excessives de dévotion se ressent d'un certain rigorisme; en réalité, vrai rigoriste Orsières ne le fut jamais; en morale, il paraît adopter plutôt des sentiments qui relèvent de l'optimisme et du bénignisme liguoriens; dans le domaine hagiographique sa prise de position est d'une modernité surprenante. Passant imperturbablement à d'autres sujets, Orsières examine le domaine de l'économie agricole et industrielle et préconise, il y a de cela cent ans, une école d'agriculture et l'élévation de la classe_ agricole.
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