Bibliothèque de l'Archivum Augustanum

Mémoire sur la Vallée d'Aoste 129 dans une ecurie ne respire qu'un air chaud, umide et crasseux et n'allaite qu'un sang aussi epais. C'est au defaut de la libre circulation que j'attribute la stupidité et les depots qu'il fait à la gorge. Ce qui me confirme dans cette opinion est que l'on voit heureusement ces infirmités devenir moins communes avec l'ivrognerie et n' attaquer gueres de nouvelles familles qui en ont été exemptes par le passé que les enfans de ceux abrutis par le vin. Il y a quelque peu d'exemples particuliers contraires à ces communs, mais l'on peut les attribuer aussi à des causes sociales. Il y en a fort peu dans les hautes montagnes qui ne font pas un usage habituel du vin. Ce qui perpetue le plus cette espece de cretins est qu'ils se marient, les enfans leur ressemblent, surtoit c'est avec des femmes qui sont dans le meme etat, et alors le degré d'abrutissement augmente, si un des deux epoux ne l'est pas ou peu il y a des enfans qui tiennent plus du sain que de l'imbecile, mais ordinairement les petits fils ressemblent à leurs grands peres. Les mariages entre proches parens produisent rarement de beaux enfans et sains, ils sont ici trop frequens parmi le peuple avec dispenses, on remarque que rien ne contribue plus à une belle population que de croiser les races surtout d'un païs different. Les familles qui ont eu cette attention se relevent: si parfois un enfant tient de la stupidité de son grand pere, en se remariant encore avec des etrangeres de bon sang leur succession se reforme; ce qu'on voit arriver du melange des blans et des noirs, et des metifs qui se remarient avec les premiers, se verifie parmi les races de cretins et de goitreux. Les remedes à ces inconveniens, qui defenderoient les mariage à ceux qui ne sont pas bien constitués de corps et d'esprit, seraient trop contraires à la religion et à la douceur de nos temps; il les faut esperer par la suite de la cessation de l'abus du vin et de l'ouverture du commerce qui exerce et etend l'esprit et ne borne pas chaque individu dans sa taniere ou dans son hameau, de l'espece de necessité qui en derive pour un chacun d'avoir quelque industrie et de la maniere de vivre avec plus de propreté et plus à l'air. L'on voit deja dans cette ville une assès jolie jeunesse qui est bien superieure à celle qui l'a precedé; on l'attribue, outre qu'on ne se fait plus un honneur d'etre des sacs à vin, à ce qu'on y vit moins dans les ecuries, et meme à l'air plus ventillé qu'on y respire par l' abbatis des noyers qui se fit d'ordre du Roi en 1770: ils couvraient toute la ville qui paroissoit plustot un bois. Les paroisses qui sortent en hiver ne sont presque point surchargées de ces imbeciles.

RkJQdWJsaXNoZXIy NzY4MjI=