Les franchises du Mandement de Brissogne 45 octroyées par les évêques d'Aoste vers 1255, en 1273, 1278, 1285 et 1287.6 Sans vouloir aborder ici l'analyse du phénomène des franchises dans toutes ses implications, on peut remarquer une différence fondamentale au point de vue de leur signification politique entre les chartes comtales et les franchises octroyées à l'échelon seigneurial. C'est un aspect fondamental pour la compréhension du développement de l'autorité des comtes de Savoie en Vallée d'Aoste, qui mérite qu'on s'y arrête. La politique comtale de concession de franchises n'était qu'un volet d'une activité articulée, visant à assurer à la dynastie des Humbertiens une prééminence substantielle sur les autres seigneurs justiciers de la région. L'image d'une suzeraineté du comte de Savoie sur les seigneurs savoyards, valdôtains et piémontais, structurée ab antiqua selon des modèles féodaux rigidement hiérarchiques, n'est qu'une pure vue del'esprit: dans la réalité, elle fut le résultat d'un effort long et constant, visant à construire (ou, si l'on veut, à reconstruire) une entité territoriale cohérente; un effort duré plusieurs siècles, dont l'essentiel se réalisa, en Vallée d'Aoste, dans le courant du XIII° siècle. Cette stratégie à long terme, qui se doublait évidemment d'une tactique non dénuée de contradictions contingentes, se développa en quatre directions: l'extension progressive du domaine direct; la mise en place d'un système de contrôle de la classe seigneuriale par le biais des institutions typiques du régime dit féodal; le contrôle du territoire et de ses habitants au moyen de fonctionnaires amovibles; et, justement, l'octroi de franchises aux communautés locales. En ce qui concerne l'élargissement du domaine comtal, les étapes principales sont connues: en 1242 Hugues de Bard céda sa seigneurie, obtorto colla, au comte Amédée IV; entre 1280 et 1320 environ Philippe Ier et Amédée V rachetèrent les diverses portions de la seigneurie de Gignod; celles de Quart et de Cly furent rattachées au domaine direct respectivement par Amédée VI en 1377 et par Amédée VII en 1384; le duc Louis acheta enfin Montjovet en 1438, complétant un processus qui avait abouti, en deux siècles, au 6 ]. -A. Duc, Cartulaire de !'Evêché d'Aoste (XIIIe s.), Turin 1884, pp. 150-152. ].- B. DE TILLIER -M.C. DAvrso, M.A. BENEDETTO, op. cit., pp. 60-67.
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