Les franchises du Mandement de Brissogne 49 trouva un débouché au niveau politique dans les Audiences générales - où les coutumiers du Tiers Etat siégeaient avec les nobles pairs et impairs - et surtout au sein des Assemblées générales des Etats, qui jouèrent un rôle fondamental dans le maintien de l'assiette sociopolitique fondée sur les accords entre les seigneurs et leurs sujets garantis par les chartes de franchises. On peut s'interroger sur la nature juridique de ces accords. On a vu que les chartes sont le résultat de pourparlers plus ou moins pacifiques entre les seigneurs et leurs sujets et qu'elles furent, le plus souvent, octroyées moyennant finances. Le rapport qui s'établissait ainsi entre les seigneurs et leurs sujets était constitué d'une série d'engagements réciproques, fondés, d'une part, sur la fidélité des sujets envers le seigneur et, d'autre part, sur l'engagement de celui-ci à respecter les libertés accordées: entre ces deux pôles se plaçaient les privilèges, les droits et les facultés que le seigneur, limitant sa propre autorité, octroyait ex nova ou dont il reconnaissait formellement l'exercice. La mentalité juridique médiévale était naturellement amenée à ranger les accords de ce type dans la vaste catégorie des contrats: les notaires valdôtains appelés à coucher sur parchemin le contenu des accords n'hésitaient pas à employer explicitement le terme de «contractus» référé aux chartes de franchises. Nous en avons des exemples dans la charte de Brissogne de 1325, que nous publions ci-après, et dans celles de Porossan (1325), des mandements de Quart et d'Oyace (1333), de Châtillon (1436) et de Gressoney (1436 et 1458).14 Même lorsque le mot de «contractus» n'est pas lâché, les chartes sont rédigées le plus souvent selon les modèles des contrats bilatéraux de droit privé. Tout comme les transactions entre particuliers, elles contiennent les clauses, typiquement contractuelles, par lesquelles le seigneur renonce à se prévaloir des exceptions que le droit romain prévoit pour la nullité des contrats («doli mali», «metus», <non numeratae pecuniae», «laesionis ultra dimidium», etc.) et des actions relatives, en droit et en fait. Les exemples abondent: en plus de celles que nous venons de citer, on peut rappeler les chartes de Torgnon et Antey (1293), de Pénis et Saint-Marcel (1295), de Cly (1304), de la Val14 ].B. DE TILLIER - M.C. DAvrso, M.A. B ENEDETTO, op. cit., pp. 56, 78, 173, 183, 212.
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