Bibliothèque de l'Archivum Augustanum

Les franchises du Mandement de Brissogne 51 est dû à une raison d'ordre essentiellement diplomatique: alors que le comte et l'évêque disposaient d'une chancellerie propre et qu'ils étaient donc à même de légitimer par eux-mêmes leurs diplômes, selon des formules figées reflétant l'exercice d'une autorité tendant à ne pas reconnaître d'autres contraintes que celles qu'elle-même se posait, les autres seigneurs hauts justiciers étaient généralement tenus à s'adresser à une autre autorité légitimante, représentée par le notaire impérial, apostolique et/ou ducal, qui s'exprimait en un langage inspiré d'un savoir juridique plus raffiné. Quant à l'interprétation et à I' application effective de ces chartes, il nous semble que le caractère synallagmatique et obligatoire pour les deux parties, qui marque tous ces documents, y compris ceux qui émanent du prince, prévaut sans contestation possible. Nous en avons la prevue à une époque où, pourtant, les franchises avaient perdu de leur vigueur primitive, lors de célèbre procès entre les communiers du Valdigne et le baron PierrePhilibert Roncas, qui s'était porté acquéreur de cette juridiction, dont il fut investi par lettres patentes du 3 février 1639. Bien qu'aucune franchise comtale ne fît mention expresse du droit de rescousse, 18 les représentants des communautés de Valdigne refusèrent pendant plusieurs années de prêter le serment de fidélité à leur nouveau seigneur, se fondant sur les reconnaissances des libertés locales de 1324 et de 1337, ainsi que sur les franchises octroyées par Amédée VII en 1391, documents qui, tous, impliquaient le maintien du territoire concerné sous l'autorité directe du souverain. Et ils eurent gain de cause, quitte à indemniser le baron Roncas des frais qu'il avait soutenus pour l'achat de la seigneurie. 19 On ne peut que prendre acte, en ce cas, d'un principe général de réciprocité des engagements, implicite dans les chartes citées. L'efficacité des franchises et leur signification politique résident donc moins dans leur contenu juridique que dans les circonstances qui en déterminèrent l'octroi et qui en permirent ou non le maintien au fil des siècles. Car il existe aussi une dynamique des franchises, liée aux contingences sociales et politiques. Les confirmations ellesmêmes contenaient, le plus souvent, des dispositions visant à faire 18 Droit de résistance et de rébellion vis-à-vis du seigneur. 1 9 J.-B. DE ÎILLIER, Historique cité, pp. 173-175; ID., Nobiliaire cit., pp. 531-532; T. ÎIBALDI, La regione d'Aosta attraverso i secoli, vol. IV, Torino 1909, pp. 279-280.

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