Bibliothèque de l'Archivum Augustanum

68 ].-G. Rivolin geant les pouvoirs constitués à prendre acte d'un phénomène social qui, négligé, aurait pu avoir de graves répercussions sur le maintien de l'ordre public. Il se peut aussi que les seigneurs, pressés par ce même besoin d'argent qui les incitait à octroyer des chartes, eussent la tendence à profiter du droit d'échute, prétextant à tort et à travers la bâtardise ou la prétendue activité d'usurier de leurs sujets les plus riches pour s'emparer de leurs hoiries (ce qui pourrait expliquer pourquoi les destinataires des franchises tenaient autant à distinguer les usuriers «professionnels» des «occasionnels»). On songe aussi aux difficultés pratiques que le seigneur rencontrait à récupérer effectivement les hoiries en question, qui, comme nous l'avons dit, étaient formées pour la plupart de biens meubles et d'argent liquide qu'on pouvait dissimuler sans trop de problèmes: il valait mieux renoncer à poursuivre certains cas marginaux d'usure, et concentrer l'attention sur les «usurarii publici», dont on se réservait toujours l' échute, et vendre aux autres le droit de tester. Sans compter que, comme nous l'avons vu, la distinction entre les usuriers publics et les petits prêteurs était plutôt floue, ce qui laissait au seigneur un certain marge d'intervention. Cette dernière hypothèse sert peut-être à expliquer l'existence des legs en faveur du seigneur, faits par des personnages probablement morts en odeur d'usure, dans le but inavoué d'épargner à leurs héritiers des sequelles fâcheuses: le seigneur avait intérêt à valider un testament qui lui rapportait une partie certaine de l'héritage, plutôt que d'entamer de coûteuses procédures visant à s'emparer de la totalité d'une hoirie aléatoire. Enfin, on pourrait attribuer l'affranchissement progressif des hoiries entachées d'usure à l'influence croissante des prêteurs d'argent sur les mécanismes politiques et sociaux des différentes seigneuries; une influence quis'étendait au fur et à mesure que les pratiques économiques se compliquaient et se raffinaient, entraînant des mouvements de capitaux de plus en plus importants. Ces hypothèses, qui ne s'excluent pas réciproquement, demanderaient évidemment d'être vérifiées par une étude approfondie «ad hoc»: ce qui dépasse le cadre de notre recherche. On peut, toutefois, d'ores et déjà constater que le mouvement de concession de franchises a en quelque sorte consacré la promotion sociale de deux catégories sociales - celle des enfants illégitimes et, surtout, celle des usuriers, au moins en partie, coïncidantes - qui jouaient un rôle actif et dynamique au sein des communautés urbai-

RkJQdWJsaXNoZXIy NzY4MjI=