21 Le Flambeau - 06
tion et de progrès. Cette aspiration passionnée au mieux ètre s' ac· compagne chez certains d'un mépris accru des « viem' » et de la tradition bretonne qu'ils personnifient. Mais d ' autres, au contraire, retrouvent, avec la fierté de leur race, le sens de sa tt·adition millé– naire - bien antérieure à la formation de la "France - et: éprouvent alors très vivement un sentiment de frustration à l' égm d de tout ce dont les a privés une éducation imposée par Paris. A cette amertmne inspirée de mobiles culturels s' ajoute celle qui provient de la constatation que sur le termin économique aussi, la Bretagne, dans l'ensemble français, a été perdante. L'ensemble dc ces sentiments constitue ce que les journau.x parisien!;' n'hésitent plus à appeler le << malaise breton >' . Si les factenrs économiques sont ceux qui suscitent les mécontentements les plus. étendus, ce sont certainement les mobiles linguistiques qui inspirent les rancoeut·s les plus profondes. Plus le breton recule, plus nombreux son! les jeunes qui considèrent ce recul comme une injustice insupportable et qui ne jugent le gouvernement, l'Etat, voire mème parfois la patrie fran– çaise, qu'en fonction du traitement anachronique et humiliant que ces entités font subir à cette langue qui est leur bien propre. Nous n'avons parlé jusqu"ici que de la situation du breton dans l' enseignement. Quelques mots suffiront pour préciser sa piace dans le reste de la vie publique. La connaissance du breton n'est imposée - ni meme conseillée- à aucun fonctionnaire: c'est à la population de s'adapter, Le breton n'est utilisé dans aucun texte administratif; sa première et dernière appariti.on officielle remonte à la guerre de 1914, quand des affiches en breton sollicitant les campagnards de ·donner leur or aux emprunts d'Etat furent placardées dans tous les villages. Le breton n'est pas admis dans les tribunaux, sauf recours à un interprète si l'inculpé est manifestement incapable de se faire comprendre: d es soldats bret-;ms ont été fusilléc; com me déserteurs pendant la guerre de 1914, faute d'avoir pu s'expliqtter devant leurs chefs. Le clergé, par facilité, renonce de plus en plus à l'emploi du breton, mème dans des paroisses où tout le monde le parle et oìt les vieillards ne comprennent rien d ' autre. A la radio, la part du breton se réduit (pour un million de personne'>!) à une demi-heure par semaine d'émission folklorique (chansons populaires, contes, monologues, etc.) diffusée par un petit poste andible dans la moitié du pays bretonnant et retransmise une fois sur deux par le poste de Rennes. On peut noter que le meme poste dc Rennes émet une heure par jour eu kabyle pour dissuader du fellaghisme quelques centaines d'Algériens travaillant eu Bretagne. Eu télévision, la part d n breton est simplement zéro: on ne dispose que d n programme parisien. -10-
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