22 Le Flambeau - 12

verts, ombragée par de gros mar– roniers . Challant-Saint-Anselme s'étale tout près du grand-chemin, au pied de la montagne, dans un en– clos verdoyant; c'est un groupe de maisons rustiques avec, au mi– lieu, la petite église bianche, sem– blable à une mère veillant sur sa nichée familiale. Le bassin s'élargit encore en' de grands prés verts, brillant au so– lei!. Ici, sur les premiers contre– forts de la montagne, de riants plateaux en pente, plus haut, d'au– tres villages sur de petits mame– lons. L'Evançon semble avoir dis– paru, on n'entend plus le bruit de ses eaux profondes. Voici poindre maintenant, dans un grand are de verdure, l'église et le clqcher de Brusson, et quel– ques maisons : la perspective est merveilleuse. A la hauteur d'Ar– césaz, on entend résonner de nou– veau la voix lente et berceuse du torrent, soulevé comme par en– chantement tout près de la route. Il dévoile par lambeaux ses ondes bleuatres à travers les ronces et les arbres. Au-delà d'un petit pont jeté sur le torrent, s'ouvre le sentier qui porte au chateau de Graines. Il se dresse sur un rocher. Le sen– tier caillouteux aboutit, après de longs détours, à l'entrée du ma– noir. On passe sous une arcade à moitié encombrée par les rui– nes et on assiste à un grand spec– tacle : de gros pans de murs ébré– chés, çà et là des arcades, une vaste muraille d'enceinte se pro– longeant du Nord au Midi, inégale, coupée en de gros blocs offrant l'aspect de créneaux avec de lar– ges trouées d'où l'on entrevoit des morceaux de paysage. L'intérieur est vaste. On voit des parterres gazonnés, des ro– ches, des talus de pierre, des buis– sons. Et voilà le squelette d'une chapelle avec sa façade en pierre nue, l'are d'entrée, un grand vide au-dessus à l'endroit de la cloche et un caveau rond au fond à la piace du petit autel. Presque au milieu s'élève, sur un grand socle, la haute tour carrée, massive, solide encore, flanquée d'une redoute. Vers le levant, le bord du rocher sur– plombe le précipice. On est saisi d'une impression de vague tris– tesse et d'égarement dans ses lieux solitaires, devant ces débris grandioses, témoignages de loin– taines époques, de vieilles géné– rations disparues à jamais, ense– velies dans le sombre oubli du temps. Le panorama autour du cha– teau de Graines est pittoresque et merveilleux. Du còté du Levant, sur la ligne du ciel, des couches de neige tranchent le noir de la roche, puis la montagne enfin boi– sée tombe à pie jusqu'au pied du « clapey » et du torrent, qui roule ses eaux parmi de grosses pi_erres polies, harmonisant sa voix à cel– le de la nature en fete. Après Arcésaz, qui s'abrite sous un monticule, dans un angle de paix véritable une masse touffue de fon~t en forme de losange se prolonge jusque vers Brusson dont on aperçoit finalement le -103-

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