23 Le Flambeau - 09

sance de travail est illimitée; il ,ressemble étrangement à un etre vivant par le mouvement, la dextérité et le discernement. L'homme n'a presque point bougé: ses deux pieds appuyent imperceptiblement et alternativement sur les pédales; ses bras s'avancent ou se retirent en gestes rapides et précis; sa tete se relève ou s'abaisse pour mieux surveiller le travail de l'engin. Dans un grincement de poulies, un cliquetis de cables, un tintamarre de ferraille, on perçoit le ronron régulier du moteur, crEur géant qui obéit à la volonté du pilote lorsqu'il lui donne l'ordre d'actionner le faisceau de nerfs qui commande le mou– vement et le travail. · f'admire l'homme, sa science précise du geste sur les com– mandes, son attention soutenue ainsi que le rythme infaillible et minuté de l'appareil; intimement liés l'un à l'autre, ils ne forment qu'une seule et meme intelligence. . Néanmoins, que le pilote ait une défaillance ou une simple distraction et la machine retombera inerte, aussi morte que la matière qui la constitue; heureux encore si une catastrophe est évitée. Et ce sera l'arret de la vie de l'usine, le chomage et les privations pour des milliers de personnes. Camme l'homme est merveilleux, considéré dans ses inven– tions, dans son travail de chaque jour, dans la domestication et l' exploitation des outils dont dépendent et son bien-etre et le progrès. Un tel spectacle justifie la belle aventure de la vie malgré ses risques, malgré ses folies et ses injustices, malgré ses con– tradictions memes et en raison, justement, des possibilités de l'intelligence unies à l'art de l'organisation, à la yolonté dans l'effort, à la solidarité dans l'épreuve. Mais encore, cet homme, soumis à un automatisme qui en fait une machine dans la machine, contraint à un rendement dont une autre machine calcule l'efficience en tonnes et calo– ries, peut-il penser encore et à quoi ? Nul doute que sa journée achevée, il demeurera hanté par 46

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