Contesse Marie Victoire de Challant-Solaro

- 25 - Elle en éprouva un sentiment de stupeur et d'épouvante. Ces gens de guerre la saluèrent avec respect et lui di­ rent le sujet de leur mission. Elle répondit avec une " modestie admirable que son dessein était de ne pas quitter ce lieu de tranquillité et de repos, puur retourner dans un lieu où elle ne pouvait s'as­ sürer de son salut » . - Ces paroles nous disent bien que la suprême crainte de la pieuse dame lui était dictée par sa pudeur. Aussi, ajouta-t-elle, « qu'elle mourrait plutôt sur cette montagne que de s'exposer à commettre la moindre action indigne de sa personne. » Devant cette protestation, les militaires se sentirent plu:; que jamais pénétrés de respect et de vénération pour cette femme, à l'air plus céleste que terrestre. Ils la rassürèrent bien, l ui garantissant que nul affront ne lui serait fait. Sur cela, elle se recommande bien à Dieu, et, adorant ses desseins, elle le bénit de la livrer un instant, sans au­ tre défense que la protection divine, entre les mains d' une :soldatesque aussi redoutable qu'inconnue, comme le fut le Sauveur aux sauvages scènes de la passion. Et, sous cette étrange escorte, voilà cette dame de cour en route, à _ pieds, sans doute. On suit le chemin de La-Madeleine et de Promiod. Ce chemin tolérable, com­ mode même e t beau, jusqu'à vingt minut _ es au-dessus de cet important village, est, nous le savons, pénible et rocailleux depuis lors. On arrive à une ferme ou mayen, appelé Brun, au-des­ sous de Promiod. La dame, conduite comme une prison­ nière, et qui , pour des infirmités que son biographe ne dé­ signe pas, ne pouvait même souvent, sans le secours d'un bras fidèle, se rendre du château de Châtillon à l 'église, était exténuée. Les · propriétaires de la ferme voient, à leur stupeur, défiler l 'étrange cortège ; ils s'aperçoivent aisément de l 'épuisement de la châtelaine vénérée. Emus, ils l'invi­ tent à se reposer un instant sous l eur humble toit et à accep­ ter quelque rafraîchissement.

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